Rennes: Violation du droit par la préfecture, elle expulse illégalement les migrants qu’elle devrait loger

Hier soir aux environs de minuit, sur ordre du Préfet et en présence du secrétaire général de la préfecture M.Fleutiaux, la police est entrée en force, en grand nombre, casquée et accompagnée de chiens, dans une réquisition occupée par une centaine de migrants soutenus par l’association « Un Toit c’est Un Droit » : un immense bâtiment d’Etat, désaffecté depuis plus d’un an.

Faisant fi de la loi et des conventions internationales concernant les demandeurs d’Asile, faisant fi du respect des procédures judiciaires, la préfecture n’a pas hésité à jeter à la rue par la force, en pleine période hivernale et de nuit une centaine de personnes dont plusieurs enfants, sans qu’aucune solution de logement ne leur soit proposée.

Malgré l’appel au calme, la non-résistance des militants sur place et la présence d’enfants, les forces de police n’ont pas hésité à bousculer migrants et militants et à user d’intimidation (chiens, coups de matraque), jetant des appareils photos et allant jusqu’à refuser à une famille de récupérer ses affaires.

Deux militants ont été menottés et interpellés, puis interrogés et gardés au commissariat. L’un a été libéré dans la nuit, l’autre en fin de matinée.

La préfecture, l’Etat montrent une fois de plus leur vrai visage. Après la grande opération de communication autour de l’évacuation de la réquisition de Pacé et les promesses faites à cette occasion, la face cachée de l’iceberg se révèle dans toute sa violence.

Nous dénonçons:

La violation du droit au logement (le local étant investi depuis plus de 48h, légalement l’expulsion ne peut se faire par les forces de police sans intervention du juge), l’arrestation arbitraire de militants, le non-respect des procédures judiciaires, la violation de domicile et l’intimidation policière.

Nous réclamons:

L’application de la loi de réquisition et le logement de toutes les personnes à la rue.
La restitution de leurs effets personnels aux personnes délogées cette nuit.

EN BAFOUANT AINSI LE DROIT ET EXPULSANT AINSI DES PERSONNES QU’ELLE A LE DEVOIR DE LOGER, LA PREFECTURE EST DIRECTEMENT RESPONSABLE DE NOUVEAUX DRAMES HUMAINS !

L’association Un Toit c’est Un Droit.

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Expulsion de l’ARS. Réaction à chaud d’une militante.
Rennes, dimanche 6 janvier.
Expulsion d’une réquisition.

Dehors, il ne fait pas vraiment froid. Juste un petit crachin breton qui pleure depuis des jours sur des nuits d’errance. Le froid qui les fait frissonner est à l’intérieur, là où s’emmagasine la fatigue des journées à marcher sans but dans la ville, en attendant la réouverture des portes du foyer. Le froid il est dans la mémoire des corps recroquevillés dans les halls de gare, d’hôpital, dans les stations de métro, les encoignures de portes. La glace, elle se niche dans les devantures de Noël inaccessibles aux enfants, dans le sourire des passants ingénus et inconscients.

File indienne, ombres dans la nuit. Silence ouaté de crainte. Est-ce que ça va marcher ?

Une porte, un couloir, des couloirs, encore des couloirs, des pièces, des escaliers, partout. « T’es où ? C’est par où qu’on est arrivés ? J’suis perdu ! ». Petit à petit, des rires fusent. C’est incroyable comme c’est immense. En plus, il y a de l’eau ! Et de l’électricité aussi ! Curieux : il fait pas froid, c’est peut-être chauffé ? « T’as pris quelle chambre toi ? ». « Le bureau du directeur ! Il y a même une porte capitonnée ! ».
Tout est propre, impeccable. Ça fait plus d’un an que c’est fermé. Bâtiment public, ancienne direction des services vétérinaires, DDASS, agence régionale de la santé … Partis où ? Services supprimés ou éclatés, ici ou là, dans d’autres lieux, parfois loués à prix d’or par l’État dans le parc immobilier privé (privatiser les bénéfices, nationaliser les déficit).
Ici, la ventilation ne s’est jamais arrêtée et il reste 200 litres de fuel dans la cuve. Dehors des dizaines de personnes à la rue en plein hiver, parfois des bébés. Pas grave : « comme le changement c’est maintenant, on réfléchit ».

Enfin, pas que. « On » agit, aussi.

Pendant qu’au 7° ciel de la réquisition les sourires illuminent tous les visages, pendant qu’on s’embrasse pour fêter ça, pendant que les militants sortent les couvertures et les galettes des rois (« avec un doigt de café, s’il te plaît »), dehors les robots-cops s’activent, bergers allemands à l’appui (faut bien ça pour chasser les enfants).

Pas de ronds de jambes inutiles. L’opération communication de la préfecture est terminée, on va droit au but, avec les moyens adéquats. « Vous sortez immédiatement ». Pas le temps de prendre ses affaires. Matraque au collet. Les chiens sur les talons. Bousculades pour les plus lents et pour les militants qui essaient de prendre des photos. En 10 minutes s’est bouclé. « Toute façon, on les connaît bien leurs tronches ». « Leurs figures, Monsieur, leurs figures ».
On essaie de se recompter dehors, dans le noir. Il en manque deux. Deux militants.
Brusquement, on les voit apparaître, cernés par un groupe de ninjas. Des fois qu’ils soient super forts et super dangereux, deux précautions valant mieux qu’une, ils ont été menottés les mains dans le dos.

« C’est quoi cette démocratie ?! » lance un migrant.

C’est quoi ces gens, élus par le peuple sur des valeurs de justice sociale, de solidarité, d’humanité et qui commanditent ça ? Que faudra-t-il pour qu’il sortent de leurs dorures et de leurs compromissions ? La mort de froid d’un enfant dans la rue ?

Messieurs et Mesdames les gouvernants, en plus d’être des traîtres, vous êtes des hors-la-loi car la loi oblige l’État à la protection des personnes. Et dans mes livres de petite fille, on m’a appris que les hors-la-loi finissaient toujours par être punis.

J. militante Un Toit c’est Un Droit, texte écrit ce matin vers 5h.

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Aucun policier n’est rentré dans le bâtiment avant l’expulsion. Comment dans ces conditions affirmer qu’il y a eu effraction ? Deux agents de la Bac se sont présentés 15 minutes avant l’expulsion pour constater l’occupation depuis le portail. Les militants de l’association sont allés à leur rencontre mais les agents de la force publique n’ont pas jugé utile d’entamer la moindre discussion ou de se présenter.
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La sécurité du bâtiment était particulièrement faible. Une vitre était brisée depuis longtemps. La société de surveillance avait pour contrat de n’effectuer qu’une ronde à l’extérieur de la propriété. Il n’y avait aucun système d’alarme.

Parler de tentative d’effraction quand une centaine de personnes occupent un bâtiment ouvert ne correspond à aucune réalité. Par contre ce que nous affirmons est prouvé et vérifiable.

Un Toit c’est Un Droit
http://untoitundroit35.blogspot.fr/