Grenoble: Récit de la marche de la colère et de la dignité du 25 avril

25 avril 2014

– La marche était appelée par la CISEM – Coordination iséroise de solidarité avec les étrangers migrants [1], en écho à une autre marche organisée en 2001. Elle a été organisée par les individus et organisations en lutte, depuis la fin mars, contre les remises à la rue des personnes hébergées dans le cadre du dispositif d’hébergement d’urgence hivernal, et pour un toit pour toutes et tous. Ce mouvement réunit des personnes hébergées ou remises à la rue, des personnes solidaires, les organisations de la CISEM ainsi que d’autres, comme RESF (Réseau Éducation Sans Frontières) ou la CNL (Confédération nationale du Logement).

Environ 150 personnes se sont réunies sur la place de Verdun, devant la préfecture de l’Isère, pour rappeler que l’État est le premier responsable des remises à la rue, et plus généralement des politiques de discrimination et de répression des étrangers qui font le jeu de la xénophobie grandissante en France. Épinglée sur son non respect de la loi sur l’hébergement (alors qu’elle est censée être le garant du respect de la loi en Isère), la préfecture renvoie généralement la patate chaude aux communes, auxquelles elle reproche de ne pas faire leur part.

Banderole pas une personne sans toit décent

De nombreuses banderoles et panneaux ont été tendus et brandis, qui clamaient « Pas une personne sans toit décent, ni un toit sans personne dedans », « Des logements décents et adaptés pour tou.te.s » ou encore « Contre toutes les expulsions, solidarité ! ». Le tract suivant, de notre cru, a été distribué durant toute la manifestation.

La manifestation s’est ensuite mise en branle en direction du Conseil général, responsable de missions sociales, notamment celle de la protection de l’enfance. Depuis un peu plus d’un an, il essaie de se débarrasser des chambres d’hôtel qu’il assurait jusqu’ici aux familles avec enfants à la rue, essayant de refiler la patate chaude à l’État, arguant que l’hébergement relève de sa compétence. Au Conseil général, une prise de parole a eu lieu, quelques slogans ont été scandés, et des tracts distribués aux personnes se trouvant là.

Après quoi le cortège, qui grossissait au fur et à mesure de l’arrivée de nouvelles personnes, s’est dirigé vers la mairie de Grenoble. Si la nouvelle municipalité grenobloise soutient le mouvement de lutte contre les expulsions, elle n’a pas proposé de solution concrète aux personnes remises à la rue, refilant, comme l’ensemble des communes de l’agglomération, la patate chaude à l’État. Les nouveaux élu-e-s de Grenoble ont en effet évoqué avec le préfet la possibilité de mettre un bâtiment communal à disposition pour l’hébergement, mais refusent de le faire si la préfecture n’assure pas l’accompagnement social des personnes – ce que cette dernière se refuse à faire. Des slogans tels que « non aux expulsions » ont résonné dans le hall de l’hôtel de ville.

Banderole contre les expulsions solidarité mairie

Puis les manifestant-e-s se sont remis-es en marche vers la Métro (la communauté de communes), où les maires de toute l’agglomération se réunissaient pour élire le nouveau président. Dès l’entrée dans les locaux, des responsables à cravate sont venus expliquer aux manifestant-e-s qu’hélas, ils tombaient mal, puisqu’aujourd’hui c’était l’élection du président de la Métro, et qu’il faudrait revenir une autre fois. Mais les manifestant-e-s voulaient parler à tous les maires de l’agglomération, et ne démordirent pas de l’envie de saisir cette occasion unique. Après quelques discussions sans issue, ils sont donc entrés en force.

Devant le fait accompli, une délégation a ainsi obtenu le droit de s’exprimer devant l’assemblée des maires et des élus. Plusieurs personnes militantes, hébergées et sans-abri sont intervenues pour dire leur refus des remises à la rue et du jeu de patate chaude que se livrent les responsables politiques. Le tract (ci-dessus) a été lu sous les applaudissements des manifestant-e-s et d’une partie des élus communautaires. Des slogans, et notamment la revendication « hiver comme été, un toit est un droit » ont tonné dans la salle du conseil de la Métro.

Prise de parole de Jo à la Métro

La direction générale des services de la Métro s’est finalement engagée, par écrit, à ce que les futurs élu-e-s rencontrent les services de la préfecture compétents en matière d’hébergement et de logement, puis, à l’issue de cette rencontre, à ce qu’une délégation soit reçue par le futur président le mercredi 30 avril 2014 à 10h00.

La manifestation est ensuite retournée sur la place de Verdun aux cris de « Pas une personne sans toit décent, pas de logement sans personne dedans », pour se disperser.

Le collectif La Patate Chaude, le 27 avril 2014

[1] AC ! Agir contre le chômage, Association de parrainage républicain des demandeurs d’asile et de protection (APARDAP), Centre d’information inter-peuples (CIIP), Comité de soutien aux réfugiés algériens (CSRA), collectif La Patate Chaude, Ligue des droits de l’Homme (LDH), Réseau université sans frontière (RUSF), Pour une alternative syndicale (PAS), Solidaires, Syndicat multiprofessionnel des travailleurs sans papiers CGT, Europe écologie les Verts (EELV), Les Alternatifs, Fédération de l’Isère du Parti communiste français (PCF), Nouveau parti anticapitaliste (NPA), Parti communiste des ouvriers de France (PCOF), Parti de Gauche (PG), Ras l’Front…

Banderole contre les expulsions solidarité Jean Pain

[Publié le 27 avril 2014 sur le blog de la Patate Chaude.]