Rennes: Section Carrément Anti La Propriété

SECTION CARRÉMENT ANTI LA PROPRIÉTÉ

A Rennes, cela fait maintenant plus de deux mois que nous nous battons pour l’existence d’un local associatif autogéré. En effet, nombreuses sont les associations sans locaux ou ne disposant d’un espace guère plus grand qu’un placard. La mairie a la mainmise sur l’attribution des locaux, donc la mainmise sur le milieu associatif. Ouvrir un lieu autogéré même associatif, pose également la question le la propriété. Le logement fait partie des besoins essentiels dont chacun devrait pouvoir disposer gratuitement. Reprenant la distinction de Proudhon entre possession (le fait d’habiter un endroit) et propriété (posséder un logement en l’utilisant pour faire du profit), nous souhaitons prendre possession de lieux pour l’instant vides, en attendant de nous réapproprier un jour tous les logements. Cette question de la propriété est loin d’être abstraite à Rennes, ville bourgeoise qui se caractérise par ses loyers élevés.

En marge du festival des Résistances qui s’est déroulé du 21 au 28 mars dernier, diverses personnes se sont réunies avec l’idée de créer un lieu associatif autonome et alternatif. Ce projet s’est rapidement concrétisé avec l’occupation d’une ancienne Mission locale, vide depuis plusieurs années. L’expérience a duré 24 heures avant que les chiens de garde de la mairie, propriétaire du lieu, ne viennent nous expulser. Mais l’essentiel, c’est-à-dire une charte associative définissant notre projet, avait eu le temps d’être achevée. Il ne restait plus qu’à trouver un autre local, tâche des plus simples, tant les locaux vides ne manquent pas à Rennes.

Constitués en  » Collectif pour l’occupation des locaux vides « , nous occupons donc un autre local depuis le 8 mai. Celui-ci se nomme le Centre Autogéré, il est situé au 28 bis, quai Saint-Cast, près du marché des Lices, en plein centre ville. En un mois nous avons donc pu commencer à mettre en place un grand nombre d’activités : expositions, journal, chorale de chants de lutte, restaurant végétarien, concerts, débats ou vidéo-débats, etc.

Le Centre Autogéré s’affirme en tant que lieu de résistance et d’expérimentation, dont les principes sont la lutte anticapitaliste et l’autogestion. C’est dans ce cadre qu’est née l’action  » un train gratuit pour la vallée d’Aspe  » qui a permis aux occupants de se rendre au rassemblement de soutien à la Goutte d’eau en revendiquant la gratuité des transports et la liberté de circulation. Des occupants ont participé à l’opération  » un train gratuit pour Cologne  » que le Centre a largement relayée. D’autres actions du même type sont en préparation, notamment un départ pour Barcelone.

Le local a permis de créer de nouvelles dynamiques, grâce notamment à la rencontre de chômeurs et d’étudiants précaires. Les projets ne manquent pas et sont pour la plupart le fait d’individus. Mais les soutiens sont nombreux. C’est important, car nous ne sommes pas encore fixés sur notre sort : nous avons récemment reçu un avis d’expulsion. Actuellement, nous négocions un bail très précaire (c’est-à-dire gratuit) avec la mairie. Mais cette dernière semble vouloir démolir les locaux pour y faire un parc, dans le seul but de faire monter le prix de l’immobilier voisin. De plus, l’été s’annonçant, la tenue du lieu risque d’être difficile.

Néanmoins, nous restons fermement décidés à établir un espace autonome et alternatif, qui sera le champ d’expérimentation de notre engagement.Quoiqu’il arrive : une expulsion, une autre occupation !

Fräulein F.

[Extrait du n°68 de {No Pasaran} (juin 1999)]