Ce vendredi 12 mai 2006 était inauguré à la MC2
http://squat.net/fr/news/grenoble081004.html
le forum « La nouvelle critique sociale », co-organisé par « La République des idées », « L’agence nouvelle des solidarités actives », la mairie de Grenoble, le conseil régional Rhône-Alpes, la MC2 et l’Institut d’études Politiques de Grenoble. Oui, oui, vous avez bien lu.
Une bonne vingtaine de personnes ont distribué un tract (lire ci-dessous) signé les Insurgé-e-s de la Critique Sociale, avant et pendant l’inauguration du forum.
Le forum s’est ouvert par une courte intro de Pierre Rosanvallon (« président de la République des idées », ha! ha!). Michel Destot a poursuivi et s’est directement fait huer et siffler par plusieurs personnes, mêlées au public. La grande salle de la MC2 était presque remplie, remplie surtout de bourgeois-es et de détritus de la gauche caviar, il faut bien le dire…
Après avoir essayé d’empêcher des gens d’assister au forum (sur ordre et dénonciation de messieurs Martel et Noblecourt, certainement, sur appel au délit de sale gueule également), des vigiles dans la salle se sont alors jetés sur différentes personnes qui criaient leur colère de savoir Destot récupérer le thème de la critique sociale en toute impunité. Des échauffourées ont alors eu lieu en différents lieux de la salle. Une fille s’est notamment fait jeter de la salle assez violemment par deux ou trois vigiles (d’autres personnes se sont également retrouvées hors de la salle, en soutien aux personnes expulsées).
Destot essayait tant bien que mal de continuer son discours, mais il n’en menait pas large. Un mec est alors monté sur la scène, a essayé en vain de lui prendre son micro, puis s’est mis à crier que la critique sociale n’était pas ici mais dehors, que c’était dehors que ça se passait. Un cravateux s’est alors jeté sur lui, aidé tout de suite par deux vigiles pour le virer de la salle. La salle était alors en ébullition, entre applaudissements et huées, la foule bourgeoise hurlant des « fascistes ! » en direction des agitateur-ice-s. Quant aux vigiles et décideurs en cravate, ils portaient tous le doux visage de la « démocratie », une démocratie pleine de fric et de flics.
Peu après, un autre mec est monté sur scène, lançant des « Fermez Minatec », annonçant explicitement la manif du 1er juin contre l’inauguration de ce qui sera le plus grand pôle de recherche pour les micro et nanotechnologies. Lui aussi s’est fait mettre dehors illico presto. Peu à peu, les acteurs et actrices les plus engagé-e-s de la critique sociale se retrouvaient dehors, plus ou moins involontairement (puisque c’est ce qui était souhaité, de toute façon, hé hé!).
Le forum a continué dans une certaine tension. Lorsque les premiers intervenants sont arrivés sur scène, quelqu’un a entonné un très amusant « Les militaires sont en costard, je répète: les militaires sont en costard… ».
A la sortie de la MC2, notamment à la fin de la première plénière (sur la « crise de la société française »), des discussions ont lieu informellement. La plupart des gens disent « je trouve votre texte très bien, mais l’action, non ! ». Autrement dit, alors que le texte dit que « le forum Nouvelle Critique Sociale est une vaste supercherie », que la mairie de Grenoble et le conseil régional Rhône-Alpes ont pour objectif de « faire taire la critique sociale, surtout quand celle-ci s’exprime en actes », concluant par « rendez-vous partout sauf au sein des moribondes institutions », comment s’étonner qu’une telle action ait eu lieu ? Cette intervention suintait pourtant des lignes du texte, soi-disant « très bien »…
« Très bien » s’il reste dans un tiroir et que la bourgeoisie peut dormir tranquille.
Mais la colère de classe gronde toujours…
Vivement qu’elle s’éclate à nouveau, comme en octobre-novembre 2005, comme en mars-avril 2006 !
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Ci-dessous, le texte distribué à plusieurs centaines d’exemplaires devant et dans la MC2:
à télécharger sur http://nantes.indymedia.org/IMG/pdf/lacritiquesocialesinsurge.pdf
LA CRITIQUE SOCIALE S’INSURGE
Nouvelle supercherie locale
Nous savons que les dents des récupérateur-ice-s les plus fourbes vont grincer, que les doux coeurs des idéalistes les plus naïfs/naïves vont en être tout retournés, mais nous n’irons pas par quatre chemins: le forum Nouvelle Critique Sociale est une vaste supercherie.
Tandis que l’ensemble des luttes sociales locales se trouvent confrontées directement à la répression par les pouvoirs publics locaux (les exemples ne manquent pas… du mouvement squat et autres luttes contre les expulsions locatives, à la lutte pour la préservation du parc Mistral, en passant par la contestation de Minatec, de la MC2, etc.), ce « forum » qui prétend aborder la Nouvelle Critique Sociale est organisé par la Mairie de Grenoble, le Conseil régional de Rhône-Alpes et l’Institut d’Etudes Politiques de Grenoble.
Endormir la critique
La direction de l’Institut d’Etudes Politiques de Grenoble a été incapable d’être solidaire de la lutte des étudiant-e-s en février-avril 2006 contre le CPE et son monde (son président usant de tout un tas de manipulations et de pressions pour renvoyer au plus vite les étudiant-e-s en cours). Quant à la Mairie de Grenoble et au Conseil régional, leur rôle pendant ces mois de lutte contre le CPE et contre le gouvernement aura été le même que pendant les émeutes des quartiers populaires en octobre-novembre 2005: quand il ne s’agissait par pour eux de légitimer la répression, il fallait au minimum appeler au retour de la paix sociale. En définitive: faire taire la critique sociale, surtout quand celle-ci s’exprime en actes.
Que ces institutions organisent un forum sur la nouvelle critique sociale nous donne à la fois envie de rire et de vomir.
Rire, parce que c’est complètement ridicule que ce soit le pouvoir qui organise un tel événement.
Et vomir, parce que c’est bien la force de ce pouvoir (la force de la gauche) que de récupérer (ou essayer de récupérer) sans arrêt les élans subversifs qui naissent ici et là plus ou moins spontanément.
Et tout ceci se passe à la MC2, façade culturelle de la propagande municipale. La politique de la Mairie de Grenoble ne fait pas exception à la politique générale menée dans quasiment toutes les villes de France sous prétexte de légalité et de rentabilité. Alors que ce n’est rien d’autre qu’un désir d’hégémonie politico-culturelle qui s’impose à coups d’expulsions et de démolitions (vague d’expulsions de squats en 2005, « réaménagement » de la friche Bouchayer-Viallet et du quartier St-Bruno pour plaire aux cadres de Minatec et compagnie, etc.).
Destotalitaire
Dans la plaquette de présentation du forum, Destot n’a pas peur d’être pris pour un menteur et un hypocrite (ce qu’il est) quand il écrit que « notre municipalité porte des politiques publiques consacrées en priorité à l’accès au logement, à la solidarité, à la lutte contre la précarité. Parce que nous refusons de limiter l’innovation aux sciences dites « dures », nous sommes heureux d’accueillir ce véritable « festival d’idées » qui veut concilier expérimentations sociales et pensées audacieuses. » En réalité, quand il s’agit de concilier expérimentations sociales et pensées audacieuses, Destot envoie des flics et des huissiers régler tout ça (combien de lieux vraiment autonomes, porteurs de création politique et d’expérimentation sociale peuvent affirmer à Grenoble n’être pas menacés d’expulsion ? Ces dernières années, dans l’agglomération, ils sont des dizaines à avoir été expulsés !). Quand il s’agit de lancer des perspectives de révolution, Destot n’imagine que « révolution technologique« [1] avec force Minatec et autres projets de perfectionnement de l’armement et du contrôle social. Quelle audace !
Mais peut-être que c’est Minatec et la MC2 qui sont à la pointe de la critique sociale… Finalement, la rue, les lieux non « autorisés » et les luttes sociales, c’est un peu vieillot… Mais… Destot, Queyranne et consorts, vous avez du souci à vous faire (et vous le savez): qu’elle soit vieille ou nouvelle, la critique sociale est proche de vous puisqu’elle a entre autres pour objectif d’abolir les postes de pouvoir que vous occupez…
Mais alors ça se passe où ?
Un autre monde est possible, plusieurs, même: ils subissent répression et expulsions de la part des pouvoirs en place. Avec le forum Nouvelle Critique Sociale, comme avec le forum « Sciences et démocratie » en juin 2005 à la MC2, ces possibles subissent tentatives de récupération et d’anéantissement, en même temps qu’un mépris affiché[2].
Ce qui est sûr, c’est que Grenoble est bel et bien « un territoire d’application concrète« [3] de la critique sociale. Les raisons de critiquer l’organisation sociale de la ville ne manquent pas ! Celles de construire d’autres rapports sociaux non plus !
Rendez-vous partout sauf au sein des moribondes institutions…[4]
Ics (Les Insurgé-e-s de la Critique Sociale) Grenoble, le 12 mai 2005
Notes:
[1] Dans la même plaquette de présentation du forum, Destot affirme avec fierté que Grenoble « est aujourd’hui aux avant-postes de la révolution technologique« .
[2] Dans le texte de présentation du forum, il est écrit: « La société française va mal. L’urgence des problèmes qu’elle rencontre en matière de chômage, d’insécurité sociale, d’exclusion ou de ségrégation urbaine, se heurte à la faiblesse des analyses et à la pauvreté du langage pour la décrire et la remettre en mouvement. De fait, elle peine à se comprendre elle-même et vit sous l’empire des clichés et des slogans. » Ce serait donc parce qu’on nous prend pour des abruti-e-s que l’on pense pouvoir anénantir nos désirs de profonds bouleversements sociaux par le biais d’une récupération institutionnelle grossière ?
[3] Autre extrait de la déclaration du maire de Grenoble sur la plaquette de présentation: « après avoir été les hôtes de ces réflexions, nous entendons bien en être un territoire d’application concrète« .
[4] Quelques liens pour vraiment mettre les pieds dans la critique sociale:
http://infokiosques.net/ (brochures subversives à imprimer, photocpier et diffuser)
http://grenoble.indymedia.org/ (infos sur les luttes sociales locales)
http://ogn.ouvaton.org/ (l’opposition grenobloise aux nécrotechnologies)
http://www.piecesetmaindoeuvre.com/ (site de bricolage pour la construction d’un esprit critique)
http://www.les-renseignements-genereux.org/ (production de brochures pédagogiques)
http://squat.net/fr (infos sur les squats à travers le monde)
http://www.leplanb.org/ (journal de critique des médias et d’enquêtes sociales, successeur de PLPL, qui avait décerné il y a quelques temps déjà la laisse d’or à deux invités du forum « Nouvelle critique sociale« . Voir http://www.homme-moderne.org/plpl/n20/p1-1I.html sur Pascal Lamy et http://www.homme-moderne.org/plpl/n25/p1-1I.html sur Toni Negri)
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Le lendemain, samedi 13 mai…
Sciences-nano-Friction… perturbée
par Radon en colère
En direct de la MC2 dans le cadre du forum sur la « nouvelle critique sociale », France Culture fait la promo de Grenoble, du laboratoire, des techno-sciences et de leur monde.
L’émission Sciences-friction de ce samedi qui invitait le CEA à nous vendre Minatec et les nanos a été perturbée par des gens du public, et interrompue par de la musique, selon la menace formulée au préalable par l’animateur Alberganti.
Celui-ci s’est plaint du « refus de débattre » des opposants. Débattre de quoi, avec les pontes du CEA qui ont fait Minatec sans nous consulter ? De la couleur des salles blanches ? Les tartuffes qui pérorent tout le week end sur la « nouvelle critique sociale » ont montré leur vrai visage : la critique sociale, c’est bon pour l’image des socialos grenoblois, mais ça ne se pratique pas en direct.
Le 1er juin à Grenoble, les opposants à ce monde totalitaire prendront au mot Destot, le CEA et France Culture : venez participer à leur atelier pratique de « nouvelle critique sociale » ! Rendez-vous le 1er juin à 12h, place Félix Poulat [à Grenoble], contre Minatec et son monde.
voir aussi:
http://grenoble.indymedia.org/index.php?page=article&id=2746
http://grenoble.indymedia.org/index.php?page=article&id=2748
Ics et autres