Romans-sur-Isère: Les poulets ont mangé du Mouton

Le 20 juin 2006

Rassurez-vous: le Mouton n’est pas mort mais il vient de se faire amputer d’une grande partie de lui-même.
Rappel des faits: Jeudi 8 juin les habitant-es de la Maison du Mouton ont la surprise de découvrir sur leur porte l’annonce d’une procédure de péril imminent sur toute la partie de la maison donnant sur la rue du Mouton. Un expert vient le lendemain, mandaté pour constater l’extrême dangerosité du lieu. Le lundi, par hasard, ils apprennent qu’ils doivent quitter les lieux avant le 19 juin. Un nouveau contrat de prêt à usage est signé avec le propriétaire sur les parties qui ne sont pas en péril imminent, mais il n’y a pas dans cette partie d’évacuation d’eau pour mettre en place une nouvelle cuisine… Bref: les autorités sont dans l’obligation de proposer un relogement. La mairie “de gauche”, pleine de bonne volonté propose alors seulement un hangar pour entreposer les meubles, la municipalité conservant les clés…
Alors du coup on s’est dit qu’on ne se laisserait pas sortir comme ça. Des barricades sont installées.
Les forces de l’ordre se sont présentées hier lundi 19 juin à 18H, se sont acharné une bonne heure avant de parvenir à entrer, puis ont accédé aux étages en passant par la cave où se déroulent habituellement les concerts, c’est-à-dire par une zone non concernée par l’expulsion… On a donc eu droit à une petite violation de domicile au passage. Et tandis que se massaient une cinquantaine de voisins et amies en contrebas, les policiers ont sorti les occupants accrochés les unes aux autres sans ménagement… vous imaginez bien.

Mais c’est surtout après que les choses se sont gâtées.
Tandis qu’une entreprise de maçonnerie montait des murs à la nuit tombante. Les habitantes et leurs amis conjuraient leur amertume par une fête sur la place, agrémentée de quelques blagues et engueulades avec des maçons, dont certains, bizarrement, regardaient les autres travailler…
Puis soudain une échauffourée éclate. Des voisins se battent avec des faux maçons qui sortent immédiatement leur gazeuse… Un peu trop tard pour deux d’entre eux, le visage en sang après avoir reçu une canette. Le camion des ouvriers est légèrement saboté (pneu dégonflé et benne renversée).
Le temps que les esprits se calment, que les ouvriers, dégoûtés, partent sans finir leur ouvrage, tout le monde s’apprêtait à rentrer chez soi lorsqu’une voiture de police, en repartant, s’arrête et rafle un jeune de 16 ans, qui a eu l’idée saugrenue d’avoir peur de la police. Il n’était pourtant passé que pour proposer un chiot à qui voulait. Du coup les gens ont dû aller au commissariat réclamer sa libération qui viendra assez rapidement. Tout le monde pouvait donc rentrer à nouveau chez soi, à commencer par les habitants du Mouton et du quartier. Mais dans la rue, une dizaine de policiers empêchent l’accès aux locaux salubres et sous contrat. Même pour simplement récupérer une chienne coincée seule à l’intérieur, c’est impossible. Il faut même reculer loin. Alors les flashballs sont braqués et une charge à coup de matraques éloigne hors du quartier les indésirables. Une personne se retrouve avec le nez et l’oreille en sang, les autres auront des bleus pour plusieurs jours. Après une heure d’errance et de détours pour arriver chez des voisins prêtes à nous accueillir, on s’aperçoit, vers 2 heures du matin, que les policiers sont repartis. On a donc pu dormir à la Maison. L’électricité nous avait été coupée…

Ce matin, réveil surprise par un bruit de craquement: De la fenêtre on peut voir les policiers de la veille ouvrir au pied de biche la porte de la cave et s’engouffrer hilares à l’intérieur. Les chambres ne donnent pas directement à cet endroit et plus tard dans la matinée, alors qu’un impressionnant dispositif policier est déployé dans le quartier, nous avons découvert le carnage: meubles et instruments (guitare, percussions…) détruits méticuleusement, nourriture répandue à terre…

Un concert était prévu ce soir; il aura sûrement lieu à la Boucherie Chevaline. Aujourd’hui dans la journée ils vont installer une barrière infranchissable interdisant l’accès à toute la rue du Mouton… On ne pourra plus voir sa belle façade…

Demain, la Mairie se présente belle pour inaugurer la place Maurice Faure, sous la rue du Mouton, en ouverture de la fête de la musique (19h). Ce sera l’occasion de demander des explications sur tous les mensonges commis sur le relogement (après l’expulsion ils ont fait croire qu’une proposition de relogement avait été faite auparavant, ils ont proposé une nuit d’hôtel aux frais du propriétaire qui refusa puisqu’il avait signé un nouveau contrat… mais pour des pièces sans accès à l’eau…). Pourquoi plus aucun élu n’était présent sur la fin de l’édification du mur ? Le Maire s’était par ailleurs vanté quelques jours plus tôt de ne pas faire usage de violence… On peut dire que c’est raté.

M.

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