Aujourd’hui [16 avril]: Une journée de sfratti. De sfratti exécutés – qui montrent que la tactique du “troisième mardi du mois” n’est pas encore mise au placard par les flics et les experts. Et de sfratti renvoyés – qui montrent que la résistance, quand elle est compacte et déterminée, fonctionne.
Commençons dans l’ordre. Les piquets prévus pour aujourd’hui – annoncés publiquement ou murmurés dans les réseaux de la résistance – étaient au nombre de onze : cinq à Porta Palazzo-Barriera di Milano, trois à San Paolo, un à la Vallette, un à San Salvario et un via Orvieto.
A l’aube, la Digos fait le tour des quartiers, et décide rapidement où attaquer : à la Vallette d’abord, où le piquet annoncé ne s’est pas encore matérialisé, puis un appartement à Borgo Vittoria, dont l’occupant avait arrêté de résister il y a un mois déjà. Camionnettes, flics en civil, rues fermées, personnes sorties du lit pour être expulsées : ainsi la préfecture réussit à mettre six personnes à la rue sans rencontrer d’obstacles.
Ensuite la police attaque corso Racconigi, expulsant un appartement ATC (office HLM) occupé il y a un mois suite au sfratto de via Gaglianico. Une centaine d’agents en tenue anti-émeute et une dizaine en civil expulsent une famille entière qui dormait sans même soupçonner d’avoir été prise dans le collimateur des policiers. C’est une manœuvre-surprise, mais cette fois la réaction ne se fait pas attendre : arrivant des trois piquets de San Paolo, des solidaires bloquent le trafic dans toute la zone entre corso Racconigi, Via Frejus et corso Vittorio avec barricades de poubelles renversées. Il y a même quelques affrontements entre les troupes et les manifestants, mais la police n’essaie même pas d’approcher les piquets.
Jusqu’au moment où la police et les gendarmes se dirigent vers un piquet. C’est celui de San Salvario, où les solidaires sont trop peu nombreux pour résister à une charge ; certains se barricadent pourtant dans la maison et ce n’est que par l’intervention des pompiers armés de flexibles (NDT: ?) que la porte a pu être ouverte à l’huissier et que le sfratto a pu être exécuté.
Les dernières visites, les camionnettes les réservent à Barriera di Milano. Ici aussi, comme à San Paolo, il n’osent pas s’approcher des piquets, qui sont tous biens nourris. Ils vont tout de même à via Feletto, qui était un peu la mascotte de la résistance dans le quartier cet automne. Ils exécutent cependant un sfratto à vide : derrière la porte qu’ils défoncent plus personne n’habite, les habitants de cet appartement ont occupé il y a déjà quelques mois une des nombreuses maisons vides du quartier.
Les camionnettes se précipitent ensuite via Verres : cette fois c’est un vrai sfratto, mais c’est celui d’une famille qui avait décidé de ne pas opposer de résistance. Pendant ce temps quelques piquets se dispersent parce que l’huissier est passé avec un report, d’autres restent dans l’attente de l’huissier toute la matinée. Vers midi, les participants aux piquets de Porta Palazzo et de Barriera se réunissent et se lancent dans une brève manifestation, en solidarité avec les expulsés de San Paolo et les sfrattati de San Salvario et pour raconter comment la résistance dans le quartier à encore réussi à renvoyer les attaques des flics.
Après 9 mois de troisièmes mardis du mois, celui-là a été la journée lors de laquelle la préfecture a probablement réussi à restituer le plus de logements possibles aux propriétaires, évitant cependant les affrontements frontaux avec les résistants qui, surtout à Barriera, Porta Palazzo et San Paolo, sont forts et bien organisés. Et que, en plus, ils sont assis sur une poudrière qui contraint les flics à mesurer avec attention chacun de leurs pas.
Macerie @ 16 avril 2013