Mardi 4 février 2014, 7 heures du matin, Villeurbanne. Une centaine de policiers investissent un immeuble occupé depuis juillet 2013 par environ 150 Roms. En moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, tous sont jetés à la rue comme des chiens. Vieillards, femmes enceintes, nourrissons compris. Tous ? Non, pas exactement. Un petit groupe d’une cinquantaine de personnes se voit proposer quelques nuits d’hôtel par l’officier de police qui dirige l’opération. Les autres doivent déguerpir.
Cette expulsion, comme toutes les autres sur Lyon, se fait en violation de la circulaire du 26 août 2012 qui prévoit que les préfets doivent procéder à des diagnostics individuels avant de traiter les gens comme du bétail. S’il avait envoyé le moindre travailleur social faire son travail, le préfet Carenco se serait immédiatement rendu compte que ces Roms là étaient en France depuis plus de 10 ans, que certains travaillaient et payaient des charges sociales, que d’autres étaient en recherche d’emploi, que tous les enfants étaient scolarisés et qu’ils pouvaient prétendre à un autre traitement que celui qu’on réserve habituellement en France aux chiens et aux Roms.
Un groupe décide donc de se diriger vers l’église du quartier. Si plus personne ne veut d’eux alors peut-être que Dieu, lui, est encore décidé à les accueillir, doivent-ils penser. A l’église de la Nativité, une discussion s’engage avec le prêtre. Un jeune homme costaud aux grand yeux clairs qui doit bien avoir une idée de la volonté de Dieu puisqu’il lui parle tous les jours. Sans hésiter, il ouvre une salle paroissiale pour mettre à l’abri ces familles qui viennent de tout perdre.
La salle n’est pas très grande mais au moins, elle protège de la pluie. Les enfants ne dormiront pas dehors ce soir et ils pourront aussi reprendre le chemin de l’école demain. La plupart de ces familles qui sont en France depuis plus de 10 ans ont des enfants scolarisés qui parlent parfaitement le Français. On est loin des clichés véhiculés par Valls et ses porte-voix racistes affirmant que les Roms ont vocation à retourner en Roumanie. Certain d’entre eux travaillent, d’autres sont en recherche d’emploi. Quand on croise les enfants dans la rue avec leur cartable, rien ne permet de les distinguer des autres enfants.
Vendredi 7 février, 3 jours après leur arrivée, alors qu’ils se demandent bien comment tout cela va se terminer, un homme pas comme les autres vient leur rendre visite. C’est le Cardinal Barbarin qui vient « exprimer le soutien de l’église catholique». (1) Le Cardinal s’exprime avec des mots simples et directs. Il remercie Dieu de lui avoir permis de les rencontrer et leur promet qu’il reviendra les voir.
Pour des raisons d’organisation, les familles doivent déménager vendredi soir. Elles se rendront dans une autre église, celle du Curé de Gerland. Il y a 3 ans, ce prêtre avait accueilli une centaine de Roms dans son église. Malgré les injonction du préfet qui lui ordonnait de les jeter dehors, il les a gardé jusqu’à ce qu’une solution digne soit trouvée. Alors tenir tête à un état raciste qui traite les plus pauvres comme des chiens, ça ne lui fait pas peur. A l’époque, un juge avait ordonné à Hollande de tenir ses promesses. (2) Hollande, vous savez ? Celui qui affirmait de façon péremptoire que son comportement serait, à tout moment « exemplaire ». Celui qui écrivait qu’il ne procéderait plus à des expulsions sans proposition de relogement.
Si ces situations se répêtent à Lyon comme ailleurs, c’est simplement parce que les préfets violent la loi. Le Code de L’Action Sociale et des Familles prévoit dans son article 345-2-2 que : « toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence. »
Il n’est pas encore précisé que les Roms, ces parias de la terre, boucs-émissaires du gouvernement socialiste et têtes de turcs préférées de Manuel Valls ne sont pas concernés.
Grâce aux soutiens de prêtres courageux ces familles vont donc attaquer le préfet au tribunal pour faire valoir leurs droits.
Qu’on ne vienne pas raconter qu’ils ont vocation à retourner en Roumanie. Ils sont là depuis plus de 10 ans et mettent leurs enfants à l’école. Qu’on ne vienne pas raconter qu’ils sont les responsables de la délinquance et de la fraude fiscale tant qu’on y est. Aucun d’entre eux n’a été condamné pour quoi que ce soit par la justice Française.
Les Roms en ont marre d’être les otages perpétuels des ambitions politiques de petits hommes en mal de reconnaissance narcissique. Ils ne veulent qu’une seule chose: qu’on leur foute la paix.
Par Philippe Alain, publié sur http://blogs.mediapart.fr/blog/philippe-alain/080214/roms-des-pretres-se-dressent-contre-la-politique-de-valls