Caen: L’occupation collective du 105-109 rue de Bayeux se poursuit

Depuis maintenant plus de 7 mois la lutte se poursuit pour obtenir le relogement des demandeurs/euses d’asile expulsé(e)s des foyers d’hébergement du « 115 » dont les budgets sont à sec. Les politiques d’austérité actuelles touchent tout le monde, français(e)s ou immigré(e)s, l’hébergement d’urgence comme les hôpitaux, les services publics, les droits sociaux…
L’occupation collective du 105-109 rue de Bayeux se poursuit donc. Cet immeuble squatté abrite actuellement une cinquantaine de personnes. Mais plusieurs dizaines d’autres personnes, françaises ou étrangères, sont toujours à la rue chaque nuit à Caen. Le 12 décembre le « 109 » a été déclaré expulsable sans délai par le tribunal d’instance. Heureusement, pour l’instant les propriétaires du « 109 » ne semblent pas pressé(e)s de faire appliquer la décision…
Manifs, rassemblements, concerts de soutien, diffusions de tracts, collages ont par ailleurs bien évidemment continué ces derniers mois. Nous avons ainsi entre autres mené 3 actions destinées à harceler le maire de Caen, Philippe Duron (PS), lors de séances de racolage électoral en vue des prochaines élections municipales. Ces actions ont bruyamment rassemblées à chaque fois plusieurs dizaines de personnes. Ces actions ont été menées car le maire dispose potentiellement de plusieurs moyens pouvant aider à résoudre la situation des personnes à la rue :
1° réquisition de bâtiments vides pouvant servir de lieux d’hébergement,
2° mise à disposition de terrains municipaux viabilisés où pourraient être montés des baraquements pour l’accueil d’urgence,
3° pousser à l’élargissement du dispositif «CHUT» qui met à disposition des expulsé(e)s du « 115 » des logements sociaux momentanément inoccupés. Une vingtaine de ces logements (un chiffre ridiculement bas à l’échelle de l’ensemble de l’agglomération caennaise…) permettent d’accueillir environ 90 personnes. Or la mairie est représentée dans les conseils d’administration de certains bailleurs sociaux locaux et il suffirait de trouver 15 ou 20 logements supplémentairs pour reloger la plupart des gens encore à la rue. Autant de pistes que la municipalité délaisse, préférant visiblement continuer à ne rien faire… Mais on ne lâche pas l’affaire et Duron entendra encore parler de nous. On attend aussi avec impatience le moment où on pourra enfin aller chauffer les oreilles de la préfecture, qui elle aussi pourrait réquisitionner des bâtiments vides ou peser pour l’élargissement du dispositif «CHUT» .
La préfecture, tout aussi inactive que la mairie, semble en fait jouer la montre, attendant apparemment le déblocage des nouveaux budgets prévus pour l’année 2014 pour reloger une partie des expulsé(e)s du « 115 ». À cette occasion, une partie des gens occupant le 109 rue de Bayeux se verra peut être proposer un relogement plus ou moins décent et plus ou moins long… à l’exclusion de celles et ceux qui seront « sans papiers », illégaux/ales, expulsables et condamné(e)s à la clandestinité parce qu’ils/elles ont commis le crime de ne pas rentrer dans les cases administratives très étroites de l’État français… La lutte actuelle connaîtra alors sûrement un nouveau tournant où la revendication « Des papiers pour tous » prendra tous son sens.

Le procès du 7 novembre

Tout d’abord, l’avocat des plaignants :

– demande l’expulsion sans délai des occupants sans droit, ni titre. Sans discussion. Au nom du droit de propriété, droit incondtionnel, inscrit dans la constitution
– précise toutefois qu’il ne faudrait pas se tromper de responsables. Les propriétaires devront faire appel à la préfecture pour recours à la force publique, la préfecture ainsi prévenue devrait loger les personnes ainsi sans abri.

L’avocat de la défense :

– défend ici les intérêts des demandeurs d’asile. Les budgets ont baissés et nous avons vu ici en juin des centaines de personnes à la rue, sans droits et sans ressources. Camp place du théâtre, squat ouvert au 202 rue de Bayeux, expulsion et de nouveau ouverture d’un squat au 103-109 rue de Bayeux : l’état n’a pas donné de solution globale depuis juin! Le problème ne sera pas réglé par l’état. Des gens à la rue, un bâtiment inoccupé depuis 6 ans, on a poussé la porte.
– oppose au droit de propriété, le droit au logement, droit incondtionnel depuis 2007. En l’appliquant à un squat et en citant les jurisprudences de délais accordés à Lyon, à Nantes et ici-même à Caen.
– reprend les 4 points qui ont menés au jugement d’expulsion du 202, rue de Bayeux:
1. sur la période d’été ? nous sommes maintenant dans la période hivernale
2. sur la sécurité ? 975 m² habitables, 17 chambres, 5 salles de bain, …
3. sur un projet de construction? Depuis l’arrêt du conseil d’état en 2012 sur le permis de construire, aucun projet de construction n’a vu le jour. Et il y aurait maintenant urgence? Aucun élément probant, pas même un planning de chantier.
4. sur d’autres solutions d’hébergement? Retour de la Direction Départementale de la Cohésion Sociale – service préfecture – et France Terre D’Asile – association, prestataire de la préfecture: demandes d’hébergement refusées par l’état, le dispositif est saturé.

– conclut en précisant que les occupants du 103-109, rue de Bayeux ne veulent voler personne, ils veulent juste être abrité. Un délai est possible.

[Publié dans le bulletin de Sous La Cendre, n° 5, Janvier 2014,]

2014-02-21_Caen_concert_de_soutien_au_109_rue_de_BayeuxConcert de Soutien le 21 février 2014:

Depuis juin 2013, depuis sept mois et demi, des familles à la rue, principalement des demandeurs d’asile expulsé-e-s des hébergements du 115, et des militant-e-s se sont organisé-e-s en “Assemblée générale de lutte contre toutes les expulsions” et ont occupé deux squats, au 202 puis au 103-109 rue de Bayeux à Caen. Pendant ce temps, la Directive Départementale de la Cohésion Sociale a continué de supprimer des places dans les centres d’hébergement d’urgence et la mairie de Caen est restée indifférente au problème. Le 24 février prochain est une échéance judiciaire qui doit déboucher sur une expulsion du 103-109: une cinquantaine de personnes, dont des enfants, seraient remises à la rue. Le Réseau Education Sans Frontières (RESF14) soutient cette lutte et toutes les familles concernées, et appelle à venir au concert de soutien qui aura lieu vendredi 21 février 2014 à partir de 19h au 103-109 rue de Bayeux, avec comme groupes Au Bout de la Rue (trio acoustique déjanté), Issachar (free-jazz) et Mazel Combo (Klezmer-Jazz manouche); et à la manifestation devant la préfecture samedi 1er mars à 14h.

RESF14 [source]