Calais: Expulsions ou solutions?

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Le 14 mai la sénatrice et maire de Calais (UMP) lance dans les médias qu’elle a enjoint au président du conseil régional (PS) de faire évacuer les campements d’exilés situés sur deux terrains appartenant au conseil régional, rue Lamy et au bord du bassin de la Batellerie. Le président du conseil régional est sommé de répondre dans les dix jours, nous sommes à onze jours des élections européennes. Il s’agit d’un de ces coups de tapage médiatique dont la maire de Calais est familière, notamment pendant les campagnes électorales. Coup de bluff aussi. Par exemple quand elle annonce par la même occasion qu’elle est sur le point de déposer une proposition de loi annulant la législation sur le délais de 48h au-delà duquel les squats ne peuvent plus être évacués en flagrance – sauf que si elle avait travaillé sur une proposition de loi, elle se serait aperçu que ce délais de 48h est une coutume qui ne figure nulle part dans la loi.

Coup de bluff, mais panique en face. Le conseil régional répond qu’il a déjà entamé les démarches en vue de l’expulsion, avant de rectifier le tir en disant qu’il avait en fait demandé un relogement des personnes dans le cadre de la circulaire du 26 août 2012.

Du côté de la préfecture, c’est l’improvisation totale. On annonce une concertation. Puis la sous-préfecture de Calais invite les associations à une réunion pour discuter de la situation sanitaire des campements. Or les associations ont saisi il y a plusieurs semaines l’Agence régionale de santé (ARS) pour lui signaler la recrudescence des cas de gale et lui demander de prendre des mesures urgentes. L’État est donc informé de la situation, et ce qui lui est demandé de faire, ce n’est pas de discuter, c’est d’agir, pour que les personnes puissent être soignées et pour éviter la contagion.

Par contre, il y a besoin d’une concertation pour mettre en place des conditions dignes d’accueil et faire disparaitre les bidonvilles et squats insalubres. Suite à la visite de Manuel Valls, des diagnostic de la situation site par site étaient annoncés, des financements semblaient disponibles et ils devaient déboucher sur des propositions. Tout-à-coup tout ça semble avoir disparu du paysage, il n’y a plus aucune perspective lisible.

Pourtant, les associations ont des atouts nouveaux pour être force de proposition. Les liens tissés avec des organismes du secteur social, comme l’association Solid’R, à l’occasion des discussions sur le squat de l’avenue Victor Hugo et l’accueil des femmes exilées. Le partenariat qui se met en place avec le PEROU (Pôle d’expérimentation des ressources urbaines, http://www.perou-paris.org et http://perou-risorangis.blogspot.fr) qui a une expérience intéressante dans les bidonvilles et campements.

Il reste à l’État d’être enfin au rendez-vous.

Photo: Rue Auber, le bâtiment de l’ancien centre d’hébergement et de réinsertion sociale géré par l’association Le Toit, laissé à l’abandon, plusieurs fois squatté, plusieurs fois évacué. Les bâtiments vides ne manquent pas à Calais. Il ne suffit pas d’avoir des bâtiments pour faire une politique d’accueil, mais c’est un élément important. Et quelques créations d’emploi pour gérer ces liux d’accueil ne seraient pas malvenues.

[Publié le 17 mai 2014 sur le blog Passeurs d’hospitalités]