Ce mercredi 27 août, la préfecture ordonne l’expulsion du camp Gare de Vaise occupé depuis 5 mois par plusieurs familles. Elles sont 9 ce jour à être « dégagées » ; soit une trentaine de personnes dont des personnes malades, des enfants, des nourrissons. Rien de bien nouveau.
Les familles n’avaient pas été prévenues de l’expulsion et étaient en dialogue avec la mairie du 9ème. Le propriétaire n’avait pas demandé l’expulsion des familles. Mais les flics n’ étant pas sous les ordres du maire, celui-ci n’a pas été averti.
Mercredi 27
Les sbires de l’états n’ont laissé que cinq minutes aux familles pour récupérer leurs affaires avant de saisir et détruire ce que cinq mois de vies ont permis de construire ; maisons, toilettes, quelques perspectives et espoirs, et pour les plus jeunes, sûrement un monde.
Une voiture a été saisie et immédiatement envoyée à la casse, les engins de chantier ont réduit cinq mois de vie en un amas de planches brisées au milieu desquelles ont voit objets, jouets, vaisselle… sous les yeux des familles.
Les familles se sont donc « réfugiées » dans un parc proche du Pathé de Vaise. Les kisdé, les ont suivies et dégagées une nouvelle fois.
19h Les familles se sont réfugiées dans un ancien parking désaffecté, un toit mais pas de murs pour dormir. Les bleus sont déjà là . Deux voitures de la BAC et deux camions de la nationale. Ils regardent les familles assises sur leurs valises et ballots de vêtements. Les rares échanges se font de leur côté, gazeuze et flashball à la main, alors qu’on leur demande simplement si on va pouvoir dormir ici ou non.
Humiliation ordinaire, même tristement banale dans un pays raciste comme la France.
22h Les keufs partent sans rien dire.
Jeudi 28
7h20 Le terrain est cerné par les CRS. Nous sortons à deux. Direct, on nous demande nos papiers. Nous faisons demi-tour. « Ah ! Ils sont là les Rroms, et y’a l’odeur avec ».
Ils nous suivent. « Sors tes mains des poches enculé ! » et coup de matraque dans les mains. « On va faire comme avec les algériens ! » (rires).
Un jeune prend un coup de matraque dans les côtes gratuitement.
Un peu plus tard, ils essayent de se faire passer pour autre chose que le bras droit armés de l’état, en conseillant aux familles d’aller trouver abri au centre d’hébergement d’urgence occupé de Frédéric Faÿs expulsable lundi 1er septembre et déjà plein.
Les flics, nous dégagent sous la menace des coups.
9h Nous nous retrouvons à nouveau dans le parc à côté du Pathé, très rapidement une patrouille de la municipale arrive « alertée » par des riverains.
Les familles ne pourront pas rester sur place ; pourtant l’écriteau « parc public interdit aux Rroms » n’a pas encore été installé !?
La discussion tourne rapidement au pitoyable, quand le petit chef de la brigade explique que les Rroms ne sont pas victimes de racisme, que lui oui l’a été dans les années 80, 90 en tant que jeune originaire du Maghreb, qu’ eux ne le sont pas, que c’est normal et que « le jour où ils arriveront à garder un terrain propre, là, ils seront peut-être acceptés ». Alors qu’obtenir des bacs de poubelles pour un terrain occupé est une bataille.
Cet ignorant n’a pas dû connaître les bidonvilles de France des années coloniales et des décennies suivantes où ce n’était pas les Rroms qui étaient, harcelés, humiliés, battus et expulsés.
Certains diront : « normal c’est un flic ». Il n’est en réalité qu’un raciste de plus parmi toutes les communautés de France où le racisme anti-Rrom se répand et devient consensuel.
Le racisme d’État et ses relais médiatiques fonctionnent bien sur les rouages huilés d’une histoire où la division des opprimés est un enjeu national. Où l’alimentation des guerres internes aux communautés et entre communautés est nécessaire au maintien de l’ordre.
Les plus précaires sont les nouveaux bouc-émissaires pour que la solidarité ne se développe pas et pour que des opprimés puissent avoir une cible facile pour déverser la rancœur accumulée de vies d’aliénation et d’humiliation.
La nuit, alors que les familles s’organisent pour rentrer s’abriter dans une maison abandonnée, les porcs reviennent et les suivent dans leurs déplacements. Elles sont donc obligées de rester dehors toute la nuit. Elles quittent Vaise tôt le matin pour l’autre bout de la ville. La traque et le harcèlement sont les méthodes utilisées habituellement pour ne laisser aucun répit aux familles expulsées.
Certains ont dit trouver ça irréel, la réalité est là, bien en-dessous des voiles des existences artificielles, en dessous du confort même précaire, la réalité est celle-là froide comme ces nuits sans toit, dure comme leurs matraques et puante comme leur « belle érection » lorsqu’on leur demande ce que ça leur fait d’avoir gazé un nourrisson.
Cette réalité n’est pas celle des lardus mais celle de l’ordre des choses qu’ils défendent.
Collectif Pied de Biche et Barricades.
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Publié le 5 septembre 2014 sur Rebellyon