Londres (Angleterre): Le squat Mamelon Tower a été expulsé par la police anti-émeute après six heures de résistance

Lundi 5 octobre 2015, dans le quartier de Kentish, au nord de Londres, des brigades anti-émeutes du TSG (Territorial Support Group) sont venus en nombre aux côtés de “bailiffs” (sortes d’huissiers assermentés anglais) pour expulser le squat Mamelon Tower, qui avait été occupé par le collectif Squatters & Homeless Autonomy (SHA). La fine fleur des têtes de cons de la police est alors tombée sur une résistance déterminée aux barricades conséquentes, si bien qu’il leur aura fallu six heures pour entrer dans le bâtiment. Six personnes ont été arrétées pour rébellion. Une manifestation bruyante s’est ensuite mise en place le soir-même à l’extérieur du comico où les personnes arrêtées étaient détenues. Des appels à solidarité seront publiés dès qu’on aura plus d’infos sur les suites éventuelles[1]. Ci-dessous, la déclaration du SHA sur les évènements de lundi, ainsi que le premier texte qu’ils ont publié lors des premiers jours de l’occupation.

SHA / déclaration du 6 octobre 2015

Hier, la Mamelon Tower occupée à été éxpulsée par les brigades anti-émeute du TSG et d’autres agents assermentés après un bras de fer de plus de six heures. Il est 9h30 lorsque les huissiers se retrouvent bloqués aussi bien depuis l’intérieur que depuis l’extérieur. Incapables de faire tomber les barricades de plusieurs portes, la police locale et les huissiers se sont alors joints à deux escadrons du TSG. En tenue de combat anti-émeute, ces derniers ont fait irruption dans le bâtiment en arrêtant immédiatement tout le monde à l’exception d’une personne à l’intérieur. Il leur a fallu quatre heures supplémentaires pour réussir à déloger le dernier occupant, qui résistait en ayant escaladé un rebord.

Le collectif Squatters & Homeless Autonomy a profondément apprécié la solidarité exprimée par les autres habitant-e-s de ce quartier de classe prolétaire. Thé, café, nourriture ainsi qu’une volonté de résister à la brutalité de la police et des huissiers ont été abondants. L’unité de la classe des travailleur-euse-s est la base nécessaire à l’efficacité et à l’autonomie résistante contre la gentrification, les bâtiments vides et l’augmentation des sans-abri. L’action et la détermination du voisinage pendant l’expulsion de la Mamelon Tower ont été une preuve manifeste d’acharnement de cette résistance solidaire.
Squattons et luttons pour des espaces autonomes !

SHA / déclaration du 27 août 2015

La gentrification est une guerre de classe. Que ce soient les bibliothèques fermées sous la pression des conservateurs, des quartiers sociaux démolis et remplacés par des appartements pour yuppies, ou des pubs et commerces locaux contraints de fermer à cause de la flambée des prix des loyers, ne nous méprenons pas: la destruction des espaces de la classe prolétaire est intentionnelle.

Le SHA occupe la Mamelon Tower dans le quartier Kentish pour s’opposer à l’expulsion des locataires sur place ainsi qu’au remplacement de la culture de la classe prolétaire par des appartements pour yuppies. Les pubs historiques, tels celui-ci, ont toujours maintenu les connexions et la vie dans ces quartiers populaires. À une époque d’atomisation sociale, connaître ses voisin-e-s est déjà un premier pas vers la résistance ; la fermeture d’espaces comme celui-là fait partie d’un effort général pour diviser et rendre cette résistance impossible – pour remplacer notre pouvoir par leur profit.

Le promoteur immobilier gérant la Mamelon Tower, Macneil Ltd, a un capital net de plus de quatre millions de livres sterling, et fera des centaines de milliers de livres sterling de profit grâce à la vente d’une « authentique expérience du nord de Londres », idée enveloppée dans un bel appartement haut de gamme, pour que ça brille.

Mais la résistance populaire à la gentrification est en cours. Les locataires et les squatteur-euse-s résistent aux expulsions menées par les promoteurs immobiliers de Guiness[2], là où les jeunes refusent de collaborer avec la police. Les manifestations passées, telles que Reclaim Brixton, Reclaim Camden et Reclaim the Beats, ont montré la vigueur avec laquelle nous pouvons nous défendre. Le Queer Punks Collective, en occupant Black Cap à Camden[3], ont lutté contre la destruction de la culture queer par la force gentrificatrice hétéro-bourgeoise. La prochaine manifestation pour Reclaim Shodeditch le 26 septembre promet de montrer encore un autre exemple de détermination résistante. Tout autour de Londres, colère et insatisfaction se répandent.

Nous utilisons l’espace de la Mamelon Tower à la fois pour nous organiser et comme espace de vie collective. Une bibliothèque publique ouvrira bientôt ici, et la première matinée de café anti-gentrification et la première soirée cinéma auront lieu dès demain, vendredi 28 août, à partir de 14h.

De Brixton à Holloway, de Hackney à Elephant and Castle, les promotteurs immobiliers ferment nos boutiques et nos pubs, ces salauds d’huissiers expulsent nos ami-e-s, ferment nos écoles, bibliothèques et hôpitaux. Donnons-leur cette « authentique expérience du nord de Londres »: expulsons-les de notre ville.

Notes:
[1] Au 7 octobre, cinq des six personnes arrêtées avaient été relâchées, apparemment sans poursuites judiciaires, mais la sixième personne restait en détention.
[2] Le Guiness Trust est une sorte d’organisme réunissant des promoteurs immobiliers “sociaux” revendiquant des loyers faibles. Il se met depuis quelques temps à expulser à tour de bras en suivant une logique d’enbourgeoisement des quartiers. Exemple à Brixton dans cet article du Guardian.
[3] Le Black Cap était un pub gay situé dans le quartier de Camden Town. Ouvert depuis le milieu du XVIIIe siècle (!), il a été fermé en avril 2015.

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[Traduction d’un article paru en anglais le 6 octobre 2015 sur Rabble.org.uk.]