Annoncé en novembre 2023, le processus d’accaparement des terres que mène l’Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs (ANDRA) dans le cadre de sa Demande d’Autorisation de Création (DAC) pour son projet industriel de poubelle nucléaire fait son chemin nécessitant une mise à jour.
Un petit récapitulatif d’abord. Le 16 janvier 2024, il y a un an déjà, l’ANDRA déposait en préfecture son dossier dans le cadre de sa gestion foncière. Objectif, obtenir 200 hectares de tréfonds et 100 hectares de terre agricole , chemins ruraux, ainsi que l’ancienne gare de Luméville en Ornois, maillon de la lutte contre le projet Cigéo. Selon les prévisions de l’Agence, toutes les surfaces manquantes seront acquises dans un délai de 20 mois.
Le 4 mars 2024, nous recevions le dossier pour l’enquête parcellaire à venir. Clôturée le 12 avril 2024 après un mois de consultation citoyenne, les commissaires enquêteurs ont rendu un avis favorable courant mai… Comme à l’habitude, celui-ci ne tient pas compte des nombreuses déclarations refusant l’ensemble du projet controversé et des multiples signes de protestations contre les expropriations en cours. Nous en étions resté là.
Le 12 juin 2024, une première offre financière « à l’amiable » est faite. L’ANDRA propose 40 000€ tout compris, soit les 8 hectares de terrain… Les nucléocrates ne sont pas nos ami.es. En réponse, sans recommandé ni accusé de réception, début septembre 2024 plus de 200 personnes sont venues défendre La Gare. Sept jours de rencontres, discussions et chantiers collectifs contre les expropriations et la future menace d’expulsion.
Le 21 octobre 2024, une nouvelle « requête en fixation des indemnités » est arrivée (une relance d’offre pour faire simple). Sans réponse officielle, cette proposition aurait été comme acceptée, la procédure accélérée et le transfert de propriété acté. Début décembre, en connaissance de cause, un « mémoire en réponse » (un majeur en l’air dans notre jargon), a donc été rédigé pour contester l’offre et en exprimant clairement la valeur inestimable de La Gare. En effet, le mémoire en réponse a mis en avant la valeur historique de ce lieu militant sans cesse en lutte contre Cigéo, l’architecture atypique des multiples cabanes et structures, fresques et exposition disséminées comme de véritables œuvres d’art. Il conteste également la dénomination de « ruine » du bâtiment principal rénové par des centaines de mains depuis dix-huit ans, qui aujourd’hui est confortable, chaud et douillet. 1 261 000€ sont toutefois réclamés, somme qui enclenche la suite de la procédure.
Fin décembre 2024, la/le juge a donc fixé la date du 4 mars 2025 pour effectuer sa visite et faire l’état des lieux de l’ancienne gare en compagnie d’un.e greffier.e de l’État, d’un.e représentant.e de l’ANDRA et de l’assoce tomate, association gestionnaire et responsable du lieu. Le jugement en délibération de fixation des indemnités est d’ores et déjà fixé en date du 19 mars 2025… Voilà où nous en sommes.
La partie administrative se termine, la phase judiciaire commence. A ce jour, sur les 379 parcelles en surface concernées par les acquisitions foncières menées d’une main de fer et aux pratiques douteuses par Emmanuel Hance, il reste seulement quatre parcelles, dont La Gare, en résistance face aux pressions, intimidations et menaces. La voracité de l’ANDRA est telle qu’elle a également avalé le champs des semeuses, autre lieu agricole de résistance à Cigéo.
Un.e juge d’expropriation a été saisi.e, et sous peu l’arrêté de cessibilité sera publié par la préfecture. Il constitue le cadre qui prépare le transfert de propriété et un recours juridique sera possible. Non suspensif, il servira de retardateur sur l’échéance du paiement des indemnités tout comme lors de l’émission de l’ordonnance d’expropriation qui elle, transfère la propriété.
Cette phase peut aller vite. La perspective des 20 mois annoncée par l’ANDRA est un délai maximum. Nous tenons à rappeler qu’expropriation ne signifie pas expulsion mais la tension monte et les incertitudes grandissent. Il restera les indemnités à verser aux ex-propriétaires ainsi qu’un courrier demandant de quitter les lieux. Notre présence deviendra illégale. Ce délai est difficile à estimer mais nous pouvons déjà imaginer vivre sur la « propriété » de l’ANDRA dès cette année.
En attendant, on n’a toujours pas envie d’attendre. Pas question de rester assis.es sur le quai les bras croisés sans agir. Légalement, nous avons encore le temps pour continuer la dynamique de ces dernières années et rendre le terrain de La Gare à l’image de notre détermination à ne pas la perdre si facilement. Sur place : vos projets et idées sont toujours possibles et souhaitables, votre présence toujours la bienvenue pour enrichir nos réflexions. A distance : votre mobilisation et votre soutien est également plus que jamais précieux, vous pouvez en parler dans vos groupes affinitaires, vous rapprocher des comités de soutien ou en créer un dans votre localités, visibiliser nos articles sur vos réseaux. pour nous aider, L’appel à dons matériels est toujours d’actualité.
D’ici et d’ailleurs, défendons la Gare pour bloquer Cigéo !
[Publié le 24 janvier 2025 sur Bure Bure Bure.]