Paris: expulsion d’un squat rue Gérard (XIIIe)

Il y a quelques semaines, plusieurs militant-e-s anticapitalistes et antifascistes ont ouvert un lieu d’habitation a paris. L’objectif ? Permettre à des mal-logés et des sans-papiers de trouver un toit et de vivre décemment. Ce matin, plusieurs dizaines de CRS ont débarqué à ce lieu sur l’ordre de la Fondation Auteuil (qui revendique le lieu) pour expulser (illégalement) les habitants. Ces derniers se retrouvent a la rue, leurs affaires sur le trottoir. Si jamais vous souhaitez venir nous soutenir, rendez-vous maintenant a l’entrée de la rue Gérard dans le 13e arrondissement.

Récit de l’expulsion:

Depuis ce matin 6h30, les forces de l’ordre et des agents de sécurité tentent d’expulser des habitants d’un immeuble occupé depuis [plusieurs semaines] par des familles au 43 rue Gérard, dans le quartier de la Butte aux cailles dans le 13e arrondissement de Paris. Une vingtaine de CRS ont enfoncé les portes, braqué des occupants sans défenses avec des armes, insulté les militants venus défendre les habitants et ils sont en ce moment même en train de murer les issues (sans laisser aux habitants la possibilité de récupérer leurs affaires !). Les CRS ont causé de nombreux dégâts à l’intérieur des habitations – ils ont par exemple cassé un piano et retourné sens dessus dessous les appartements.

Tout cela sans avis d’expulsion valable.

Un petit historique de cette affaire plus que vaseuse :

Guy (pseudonyme), est en guerre judiciaire depuis 20 ans avec une association nommée « Association des Carceri ».
Cette association a récemment réussi à l’expulser de l’immeuble qu’il habite depuis 1964, ainsi que d’autres occupants de ce même immeuble.
L’élément central de cette guerre judiciaire est une propriété (un ancien couvent) qui appartenait officiellement à un curé mort sans héritier en 1939.
Jamais léguée, elle reste habitée par des bonnes sœurs jusqu’en 1962, date à laquelle Guy est hébergé là-bas en échange de services d’entretien. Une fois les bonnes sœurs décédées, Guy se retrouve seul avec cette propriété, il fait donc appel à la Mairie et au Diocèse qui lui font comprendre qu’ils n’en ont pas grand chose à faire…
Il devient grâce à la loi propriétaire, du fait de la prescription acquisitive des 30 ans. Entre-temps Guy héberge de nouvelles familles qui s’installent, et pour certaines deviennent également propriétaires par prescription. Ils recueillent des enfants, des familles isolées, et fait revivre le lieu.

C’est en 2007 que l’association des Carceri entre en jeu et réclame la propriété.
Elle avance que le curé aurait légué la propriété à l’association Carceri après sa mort. C’est en fait la très controversée Fondation Auteuil qui a racheté l’association Carceri (qui n’existait plus de fait) pour récupérer les lieux.

Ils s’acharnent alors contre Guy et les autres habitants afin de les faire expulser et de récupérer la propriété. Ils font appel à des entreprises de sécurité privée pour intimider les habitants et murer des parties du lieu.
L’année dernière, un avis d’expulsion est délivré contre Guy qui décide de quitter les lieux pour ne pas que les autres habitants puissent se faire expulser eux aussi. C’est cet avis d’expulsion qui a été utilisé ce matin lors de l’expulsion alors même que Guy n’y habite plus.

Comment arrivent t-il a expulser sans titre de propriété ? Quel est leur intérêt dans cette affaire ? Serait-il financier ? Ils sont déjà propriétaires de nombreux locaux, notamment une bonne partie de la rue Jean de la Fontaine à Paris. Autant de questions que les habitants de l’immeuble n’ont pas réussi à trouver avec leurs moyens. Des militants de plusieurs collectifs se sont retrouvés autour de ce lieu afin d’aider les habitants. La Fondation Auteuil est très controversée : elle était historiquement liée avec le groupe d’extrême droite Saint Nicolas du Chardonnet et ont même changé nom en 2002 suite à une affaire de pédophilie. Ils contactent des personnes âgées, souvent isolées, pour les convaincre de léguer leur fortune à la fondation après leur mort : les legs représentent 1/3 de leurs ressources (70,8 millions d’€ en 2006 !).

C’est un très rapide résumé de la situation, Guy et les autres habitants ont toutes les preuves de ce qu’ils avancent (étude historique de la propriété par un historien, actes de propriété, factures liant Carceri à la Fondation Auteuil, etc.). Ils ont énormément d’informations en plus à vous apporter.

Le jugement en appel aura lieu en septembre.

Collectif rue Gérard (collectifruegerard @@@ gmail.com)

[Publié le 21 avril 2015 sur Paris-Luttes.Info.]