INVITATION POUR UN REPAS ET UNE DISCUSSION EN SOUTIEN À LA MAISON DE LA GRÈVE, SAMEDI 11 DÉCEMBRE, À PARTIR DE 18h, AUX HALLES MARTENOT, SUR LA PLACE DES LICES
Quelque chose de nouveau est en train de naître. Pour une fois un mouvement social se transforme en autre chose que le retour à la normale et la perspective désabusée des prochaines élections. Au plus loin de nous, il y a les grèves qui commencent en Irlande, en Angleterre, en Italie, au Portugal, en Allemagne, en Grèce, en Guadeloupe… Grèves générales contre les plans d’austérité des gouvernements de droite et de gauche ou grèves dans les facs. Une chose est sûre : partout la situation est explosive.
En France, dans plus de trente villes les AG interprofessionnelles continuent à s’organiser localement, puis régionalement et nationalement grâce aux coordinations. La force de ces AGs ? Se poser les questions stratégiques. Lors du dernier mouvement nous avons ressenti que nous sommes en capacité de paralyser le pays. Pour cela, il a fallu s’organiser au-delà des identités socio-professionnelles, de qui est syndiqué ou non, et sur des modes d’actions qui ne sont pas seulement symboliques : la grève et les blocages. Comment faire ressurgir cette force ? Comment ne plus dépendre des bureaucraties syndicales qui décident seules de l’arrêt du mouvement ? Comment gagner les prochains mouvements ? Comment inventer d’autres rapports sociaux que ceux du capitalisme ?
Nous devons répondre à ces questions en nous saisissant des possibilités qu’offre la situation et non en nous enfermant dans des guerres de chapelles idéologiques. Et des réponses concrètes commencent déjà à émerger :
— Soutenir les luttes locales en continuant la pratique des piquets volants ;
— Cartographier les flux économiques locaux pour savoir quand et comment les bloquer ;
— Mettre en place les caisses de grèves et les cantines pour que l’argent et la nourriture ne soient pas les raisons de l’arrêt des luttes.
À Rennes, la Maison de la Grève, ouverte par l’AG interprofessionnelle lors du dernier mouvement contre la réforme des retraites, était l’endroit où toutes ces dynamiques prenaient corps. S’y déployaient également de multiples ateliers (informatique, sérigraphie, boxe-autodéfense, mécanique vélo, etc.), des permanences pour l’autodéfense juridique, et des discussions, films, concerts, pièces de théâtres pour se nourrir d’autres imaginaires que celui du capitalisme. La Maison de la Grève était un lieu ou se croisait chaque semaine plusieurs centaines de personnes (entre 50 et 70 couverts pour le meilleur resto du monde quatre fois par semaine !) et où il était possible de nous coordonner pour (ré)inventer, à la suite du mouvement contre la réforme des retraites, les nouvelles manières de faire grève et de bloquer l’économie.
Ces nouvelles formes de luttes sont celles qui prennent en compte au moins trois réalités. Les grèves classiques d’arrêt du travail, en les augmentant par les techniques de coulages, de grèves tournantes etc. Les blocages des flux économiques (axes routiers, transports en commun, informations nécessaires aux institutions, médias, etc.) qui prennent en compte que le capitalisme est devenu pour une bonne part immatériel et qu’ainsi il ne se restreint plus à la seule exploitation salariale mais colonise tous les pans de nos vies. La solidarité avec ceux qui ne peuvent pas se mettre en grève, par exemple par les dons en légumes des paysans en luttes.
En expulsant la Maison de la Grève, la mairie de Rennes choisit de se mettre clairement contre ces dynamiques. Et le dispositif de répression mis en place est plus que parlant, il révèle le pouvoir total qu’elle croit avoir sur ceux qui vivent à Rennes et sur les initiatives qui s’y construisent. Contre ceux qui luttent c’est un état d’exception digne de l’anti-terrorisme d’État qu’elle instaure :
— Procédures judiciaires d’exceptions, personne n’a été convié au procès et l’ordonnance de quitter les lieux a été remise à six heures du matin au réveil par la police ;
— Dispositif policier complètement disproportionné, plus de 70 gendarmes mobiles en armure, et les toutes nouvelles forces d’intervention de la police nationale réunissant RAID et GIPN (le FIPN) ;
— Collaboration étroite avec les médias pour s’assurer de leur communication, Ouest-France est sur les lieux dès le début de l’intervention policière pour filmer et plus tard ce journal refusera tout communiqué prenant parti pour la Maison de la Grève ;
— Tentatives de stigmatiser ceux qui participent à la Maison de la Grève en les faisant passer pour une minorité dangereuse pour toute la population.
Malgré cela il n’est pas question de parler de la Maison de la Grève au passé. Une partie de ce qui s’y passait va continuer de manière régulière dans des bars ou dans des salles (l’AG interpro, les groupes de travail et quelques ateliers). Un planning arrive bientôt pour tous ceux qui souhaitent y participer. La question de l’obtention d’un lieu reste bien sûr ouverte, et personne n’envisage rester en exil très longtemps. Nous avons encore des expériences et des luttes à partager. Retrouvons-nous pour discuter et manger ensemble samedi 11 décembre à partir de 17 heures 30 aux Halles Martenot, place des Lices.
Contacts : mail / 07 86 14 88 22
AGI Rennes, 8 décembre 2010.