PV de la réunion du 7/05/2002 sur le thème du logement |
Présents : plusieurs (~30) habitants de squatts et ex-squatteurs, la CODHA, la CIGUE, l’ASLOCA, le Parti Socialiste, SolidaritéS, les Verts, et d’autres… En tout environ 50 participants.
19 :30 Le Débat commence :
1. Le manque de tous types de logements à Genève. |
Exemples :
La Cigüe: bientôt 60 étudiants seront évacués des villas derrière les Nations Unies (contrat de prêt à usage). Genève ne manque pas seulement de logement, mais aussi d’espaces de vie culturels et d’échange. La création de ces espaces a été prise en charge par le mouvement squat, avec peu de relais politiques. Or beaucoup d’espaces culturels ferment, tels que le Goulet entre autres. La Cigüe cherche des logements communautaires, de pas trop grandes dimensions (contrairement aux logements universitaires) où les échanges humains soient possibles ; toujours prête à prendre du logement précaire, rénover, récupérer des immeubles…
L’Asloca (C. Sommaruga) : compte aujourd’hui avec 25’000 membres. Tous les jours entre 40 et 50 d’entre eux s’adressent à la permanence. La préoccupation principale en ce moment c’est le retour en force du congé-vente, les évacuations de locataires (défaut de paiement de loyer) et aussi la disparition du logement bon marché. La situation des baux résiliés est avouée même par les propriétaires. Leur priorité c’est de construire et de maintenir un logement bon marché, en ville, (de taille humaine), lutter contre la hausse de loyer et (re)loger ceux qui cherchent.
Squatter X: On assiste à des évacuations massives ; il faut créer une cohésion entre les maisons à travers un journal, la radio ou autre, de sorte à pouvoir mener le combat depuis le même front. Beaucoup d’entre nous ressentent la nécessité de stabilité à travers un bail associatif, d’autres veulent garder la ligne éphémère des squats. Ce n’est pas contradictoire de lutter ensemble contre la concentration au centre ville de personnes à haut revenu qui engendre la poussée des moins riches vers les alentours.
2. La politique du logement de ces dernières années |
– Maurice : récapitulation : Le logement est recherché par quelques-uns uns de manière institutionnalisée et stable, par d’autres illégale et instable… – Public : qu’est c’est que cela veut dire stable ? Je veux une situation stable mais pas légalisée. Les squatters ne sont pas pris en compte alors qu’à Genève il y entre 2000 et 2500. Même la Ville se comporte comme un propriétaire. – Jean Marc : on peut imaginer des projets stables sans légalisation mais on constate qu’il y de moins en moins. En effet la loi n’est pas adaptée à la situation actuelle, on peut chercher des expériences et exiger que les lois s’adaptent. Dans le débat de ce soir la notion qui est en question est la tolérance ; il n’y a plus de tolérance envers les expériences de vie et de travail alternatif ; la tolérance est une fonction inverse de la situation immobilière… (rires). – R. Pagani : Le mouvement squat a renversé la tendance de pousser les habitants à l’extérieur de la ville. Aujourd’hui ce sont les employés de multinationales qui veulent venir au centre. Notre travail c’est de faire que la ville soit le lieu de vie communautaire, le mouvement squat ne peut pas être exclu de cela. La pression politique et les manifestations faites jusqu’à maintenant ont servi à la logique des maisons bon marché, mais aujourd’hui il faut exiger que cela ne soit pas relégué ¨à la périphérie. – CODHA : Moutinot a fait des efforts pour favoriser le logement associatif, mais il y des grands manques réglementaires (régime d’attribution des subventions p. ex.). Il y beaucoup de choses au niveau de la loi qu’il faudrait aménager. – Maurice : A partir des dernières élections au Grand-Conseil la situation a beaucoup changé. On est face à un durcissement des acteurs du marché immobilier. La tolérance dont on parle est calquée sur le marché immobilier. Quelle est votre vision ? – Jean Marc : Pendant quatre ans de législation de gauche jamais autant de squats ont été évacués… – R. Pagani : …il ne faut pas confondre : l’exécutif est toujours resté à droite… Dans l’exécutif il n’y pas la volonté de construire du logement en ville. La semaine passée il y a eu une modification de la LDTR (fixation d’un niveau de loyer max. à 3’800 francs). Un référendum a été lancé contre cette manœuvre qui ne bénéficie qu’aux riches ; ça va barder ! et on peut s’attendre à pire encore ces prochaines années. – Bavarel : Peut-être que les derniers quatre ans n’ont pas été très positifs, mais l’avenir sera pire… Comment définir des typologies réalistes de demandes de logement ? Il est difficile pour certaines catégories d’habitants d’entrer dans un cadre légal précis, donc d’accéder aux aides d’État. On a besoin de projets tels que Rhino pour montrer la complexité de projets artistiques, indépendants. Le mouvement squat est un lieu de formation pour des artistes, artisans, etc. Les concerts, l’art et l’artisanat appartiennent à un ensemble. La difficulté pour un politicien c’est de soutenir ce type de logement quand il y un tel manque de HBM et d’HLM. Comment faire pour vivre en mixité ? – Public : A Lyon il y a une politique volontariste qui cherche la mixité. Dans beaucoup d’immeubles on trouve toute sorte de population, pour faire de sorte à ce qu’il n’y ait pas une concentration des riches dans une section de la ville et d’autre par un isolement des moins démunis. – Nicolas (squat le singe) : En effet ces immeubles étaient squattés. On a évacué des squatters pour créer cette « mixité », c’était bien la peine. – Squatter : Nous vivons ensemble, nous partageons une vie commune. Chacun a une définition différente de vie communautaire. Je ne sais pas si les squatters s’expriment mal ou si les politiciens ne comprennent pas. – Bavardel : Qu’est que cela veut dire mixité ? Cela veut dire éviter la formation de ghettos. Par rapport aux squatters : oui, les choses ont été mal comprises de la part des politiciens. Les artistes des squats épargnent une subvention à la Ville. Le travail du milieu squat n’a jamais été évalué alors qu’il a une importance essentielle. En même temps le mouvement squat est devenu personne. D’autre côté on a le souci de créer des HLM et des HBM. En tant que politiciens notre devoir est de créer des logements décents pour des milliers de familles. La solution à ce besoin des squats et des locataires est proposée par des associations telles que la CODAH et la Cigüe entre autres. – S. Kanaan : Il y a rarement eu tellement d’acteurs différents réunis dans une même salle, ce qui est une vraie opportunité. On va vers une catastrophe majeure, pire que dans les années 80, les premiers projets de la droite le montrent. On va vers un monde de résistance difficile, les propriétaires n’ont plus aucun scrupule. Cela dit, la LDTR est un bon outil, malgré ses défauts. Pour construire, il faut déclasser des zones, mais ça prend du temps. Le mouvement squat est né de manière très politique et collective : il a servi à dénoncer les abus de propriété. Aujourd’hui chaque squat vit sa vie, le message n’est plus clair. Si le mouvement squat communautaire se perd, il perd aussi sa force et les causes qui l’ont formé seront plus difficiles à défendre. Le système politique a besoin d’idées, le système législatif a la peine à se rattraper sur la diversification des formes de logement. Manifestez-vous !. – Squat : on ne se manifeste pas !?? Nous sommes minoritaires, ok, mais quand il s’agit de récupérer la chose c’est la base qui le fait. Je fais un appel au milieu alternatif à se bouger le cul pour créer, pour défendre. – Yann (le jardin) : si vous attendez une grande unité il faut savoir que le mouvement squat n’est pas un parti politique mais des gens qui veulent vivre à leur manière. – J. Musy : Le mouvement squat a subi un fort changement. Au début il a utilisé des formes d’action très violentes dans sa lutte contre les spéculateurs. Ensuite il s’est développé autrement : achat des maisons, création de coopératives… Dans ces formes d’organisation on trouve une convivialité très forte parce qu’on a besoin de lutter contre la solitude. Le milieu squat n’est pas homogène : il existe des lieux alternatifs sans logement. Ex : Mottatom. On observe deux problèmes : 1. Comment travailler différemment et comment vivre différemment ? On trouve trois catégories de besoins : 1.les squatters 2. Le travail alternatif 3. le mouvement alternatif, qui ne sont pas contradictoires, mais il manque cohésion de quartier. Aujourd’hui il faut trouver des traits d’union entre la population : les squatters ont besoin d’aller vers la population, et les politiciens ont besoin d’aller à la base. – Squat : la ville n’est pas très claire dans ses prises de position. – Jo : Je ne suis pas squatter, mais je suis convaincu du besoin de le faire. Le Grand Conseil doit faire appliquer la loi. Si les propriétaires décident de violer la loi (garder des logements vides) ils ne peuvent pas demander à un juge de les défendre. – C. Sommaruga : Aujourd’hui la population squat, qui n’est pas négligeable, montre un mode de vie différent. Il faut joindre les revendications des demandeurs de logement (qui est le mode de vie dominant) et celles des squats. Les politiques actuelles ont visé à mettre en place des instruments pour la construction d’HMB et d’HLM et pour la création de fondations qui acquièrent les terrains. Les autorités n’ont jamais eu l’initiative d’exproprier pour le logement. La difficulté aujourd’hui est de trouver les moyens pour que le mode squat puisse trouver des revendications communes avec le monde des locataires, telles que : avoir un logement, garder certains nombre d’acquis légaux, mettre des nouvelles clauses légales. A chaque fois qu’il y un commerce qui se vide et qu’à l’origine il était un logement, il doit revenir un logement. – Jean Marc : qu’est-ce que le logement « social » ?. Le HBM et HLM sont des conneries. Tant en termes d’idées comme d’outils on n’a pas les moyens pour faire du logement social. – Daniela : l’évolution du logement contient beaucoup d’expériences des squats. Il faut essayer de voir de plus près jusqu’à quel point les propositions des tracts, slogans, banderoles sont réalisables. – Squat : On a oublié de parler des besoins d’une population qui est toujours négligée : les sans papiers, environ 15’000 à Genève. Qui dit alternative dit alternance, une autre manière de penser. – Joe :Les squats peuvent mettre en avant la lutte contre l’augmentation artificielle des loyers, pour l’habitation du logement laissé vide, mais il faut faire des choses simples, expliquer aux gens que leur loyer est artificiellement augmenté. – R. Broggini : Nous sommes des acteurs de la vie économique et sociale, nous de sommes pas des marginaux. Ce sont ceux qui veulent s’enrichir qui doivent être marginaux. – Nicolas : Le squat ne peut pas se transformer en politique de logement parce que cela veut dire achat, propriété privée. – Joe: Le nouveau procureur général ne va tarder à prendre ses fonctions. Il faut le confronter tout de suite à la réalité : soit il a les gens sur la rue et il quitte son mandat, soit il prend en compte la population. Il faut faire quelque chose de symbolique.
3. Les coûts liés au logement |
– Maurice : Le loyer ne correspond pas forcement égal à de l’argent liquide payé, mais à des travaux, à la rénovation, à l’entretien. Qu’est c’est que vous comprenez par logement ? – Einstein (fidèle casserole) : une maison il faut la construire. Cela coûte de l’argent. – Joe: le prix du logement sont ses coûts marginaux. La construction de cet immeuble (par exemple) il y cent ans est largement amortie. Le loyer maintenant devrait payer le service d’eau, d’électricité, etc., l’entretien. – Jean Marc : La collectivisation du sol permettrait de gérer le coût sans avoir une mentalité de maximisation du profit. – Maurice : Il n’existe pas un règlement pour les habitants pour qu’ils aient le droit d’emption (= priorité à l’achat) lorsque l’immeuble est vendu. Il y a des propriétaires qui possèdent de nombreux immeubles et cela leur permet de se trouver dans un jeu de spéculation. La propriété collective permet de casser ce système. Au niveau loyer on peut faire une jointure pour ce qui représente une somme adaptée aux besoins du logement. Les locataires comprennent-ils qu’ils sont exploités ? – Joe : oui, le message doit être simple. – Sommaruga : effectivement les « working poor »sont pris dans le piège. Il faut défendre la rénovation bon marché, la suppression de la possibilité de vendre les appartements une fois qu’ils se vident et la possibilité pour les locataires d’acheter. Il faut défendre les biens collectifs contre la spéculation. L’aspect offensif consiste à restituer les locaux commerciaux au logement. – Maurice : pour quoi seulement les locaux commerciaux ? – Sommaruga : le problème avec les autres types de locaux c’est la qualité de l’habitat. A la Jonction des usines ont été occupées, mais elles n’étaient pas conditionnées pour le logement. Alors il faut chercher les locaux commerciaux qui étaient affectés au logement. – Daniela : il y a ici des personnes qui cherchent du logement différent, pas des 2, 3 pièces. On cherche à modeler l’image de l’habitat. – Jean Marc : en France des études sont réalisés pour adapter l’habitat aux nouvelles formes de structures sociales (famille de 15 personnes etc.) A Genève il n’y a aucun espace sauf les squats qui pense à ce type de logement. – Cigüe : le droit d’emption des locataires s’applique dans le domaine agricole, or il semble logique qu’un habitant soit le premier à décider quoi en faire de sa maison… Un autre problème est le coût élevé des travaux : la Cigüe a déjà essayé de construire du logement alternatif en faisant réaliser les travaux de rénovation par des artisans hors-cartels. Or ce sont les syndicats qui se sont plaints car on les enlevait le travail. L’État semble ne pas trouver des solutions au logement bon marché. La seule chose qu’il propose ce sont des HLM. C’est trop dommage que des expériences comme Rhino disparaissent. Ce qui est important pour le logement alternatif c’est le réseau. Intersquat existe-t-elle? – Squats : bien sûr ! – Yann (Jardins) : Pas du tout. Intersquat n’existe pas. Aujourd’hui il existe de quoi loger entre 1000 et 1500 personnes dans des locaux commerciaux : je propose que nous les occupions. Au lieu de parler de la défense des maisons il faut construire. Arrêtons de défendre des choses qui sont en train de disparaître. – Bavarel (VE) : Les politiciens ont besoin de suivre le coup. Il faut savoir manipuler le politicien. La politique pour moi c’est gérer la cité en prenant en compte qu’on vit tous ensemble et qu’on a des projets collectifs. Arrêtez de dire qu’on se fait récupérer par les politiciens. C’est légitime de créer un endroit. – Yann (le Jardin) : le problème principal ce soir c’est d’enlever le pouvoir de cette table. – Maurice : Aujourd’hui on a besoin de solutions pragmatiques. – Yann (le Jardin): C’est l’occupation. – Daniela : L’action est pour certains l’occupation, pour d’autres le politique. – Maurice : Porto Alegre est une municipalité composée par personnes compétentes et c’est l’association de quartier qui décide sur les projets prioritaires, le budget, etc.. L’idée de Porto Alegre c’est la démocratie de proximité. Au niveau logement est-ce que vous pensez qu’on peut reprendre ce modèle ? – Squat : à la Jonction on a essayé de faire cette expérience, mais les politiciens ont eu l’impression qu’on leur volait leur travail… – Yann (le Jardin) : Qu’est-ce que vous pensez sur l’idée d’occupation de locaux commerciaux ? – Broggini : le 5 rue Rousseau est un tout petit projet. Si ici on se mobilise pour faire revenir en arrière la décision de transformer ce local en commerce on fera déjà un pas dans la politique de petits pas. – Joe : c’est au Centre Ville qu’il faut des habitants. – Maurice : Est qu’à ce stade de discussion c’est possible d’organiser une manif ? – Jean Marc : est qu’on fait un truc ensemble ou pas ? – Sommaruga (ASLOCA) : c’est important d’avoir un front commun, on peut se retrouver. – Bavarel (les Verts) : on soutient une manif autour de Rhino et du logement. – Public : il y une grande diversité d’intérêts dans cette salle. Il faut se retrouver dans un objectif pour soutenir les différentes formes d’organisation et d’action. – Daniela : une manif qui marche c’est celle qui fait un appel public à l’histoire qui nous concerne tous. Or les médias font croire que la situation du logement s’améliore. Étant donné qu’aujourd’hui il y peu de mobilisation, c’est à tous, y comprit aux politiciens d’informer sur la situation réelle. – Public : Ce qui ressort ce soir c’est le besoin de travailler sur les locaux commerciaux, car la Ville elle répond toujours aux squats et au milieu alternatif qu’elle n’a pas des locaux. La priorité c’est de faire un mouvement plus large que celui des squats. Il faut faire des actions communes. – Yann : ok, on fait une grande manif sur le thème du logement, mais le constat jusqu’à maintenant est que les squats sont toujours la dernière roue de la carrosse. On fait du logement social, mais les squats sont oubliés. – Squat : les Étuves se font évacuer le 3 juin. – Daniela : quoi qu’on fasse cela doit être les squatters et non pas des organisations officielles les principaux concernés. – Maurice : il s’agit de faire une manif sur le logement, et non pas seulement sur les squats. – Public : je ne squatte pas, mais le logement nous concerne tous. – Daniela : les squats devraient être au cœur de la manif, mais il y aurait du soutien des partis politiques. – Sommaruga : La manif ne doit pas seulement être pour les squats, mais aussi pour toute la population exploitée. – Jean Marc : on se revoit mardi prochain. On peut envisager de faire la manif le 8 juin.
Résumé : |
-Manifeste désir de la part de la plus part des squatters et des associations présentes de créer un réseau de logement alternatif avec des propositions concrètes, des idées pour les politiciens. – De la part des politiciens : soulignent le besoin pour le mouvement alternatif de s’adresser à la population, d’intégrer le quartier dans leurs revendications…
Pour prochaine réunion : |
– Qu’est-ce qu’on attend de la manif (nous faire écouter ?, par qui ?, pour dire quoi ?) – 3 cibles : 1.locataire, 2.propriétaires, 3.la Ville – Comment toucher le public ? Comment faire comprendre aux locataires qu’ils sont exploités, qu’ils sont pris dans un piége du « marché du sommeil », et qu’il n’y a pas concurrence entre squatters et locataires ?(des bons slogans, chansons, performances…) – Comment s’adresser en même temps aux propriétaires pour leur faire entendre le « ya basta ! » (Occupations de locaux commerciaux vides et avant étaient des logements. Avec quelle perspective : créer un projet concret, y habiter ou purement symbolique…peut-être pour une manif ce qui nous faut ce sont des actions symboliques, mais une manif n’est pas une solution, c’est juste un début. – Comment s’adresser à la Ville pour montrer ce qu’on veut, et jusqu’où est c’est que nous sommes capables d’aller pour l’atteindre.
RHINO (Genève)