Paris-banlieue: La police tombe sur un os

Courant septembre, en région parisienne, des flics appartenant très probablement aux « services spécialisés » ont tenté d’acheter un squatteur sans-papiers pour qu’il devienne un de leurs indicateurs. Mais contrairement à ces chiens de garde du pouvoir, pour nous, la liberté n’a pas de prix. Ils sont donc tombés sur un os.

« Je me suis fait arrêter à l’expulsion d’un squat, on était 5 à l’intérieur. Deux d’entre nous ont été embarqués pour défaut de papiers. Pendant l’expulsion, tout ce que je demande aux flics est accepté alors que mon pote qui s’est fait arrêter avec moi se fait tout refuser, y compris les toilettes.

Au commissariat, on est assis côte à côte. Mon pote va en cellule sans fouille ni prise d’identité. Moi, une fille en civil avec des cheveux rouges vient me demander si on peut discuter un peu. Je dis ok, et en montant je lui demande si elle va me mettre en centre de rétention, m’expulser direct ou me mettre en garde à vue. Elle me dit que je vais être libéré. Je me trouve dans un bureau avec 3 femmes et 1 homme, tous en civil. Le mec était habillé en jean Levi’s, chemise à carreaux. Je sais pas si ils faisaient partie des flics du commissariat. Une des femmes prend en note tout ce qui se dit et les trois autres flics me parlent. Ils me demandent pas mon nom, ils le connaissent. Je leur demande comment, ils me répondent que c’est pas important.

– Pourquoi tu vis en squat?
– Parce que j’ai pas de maison.
– Comment tu connais les gens du squat?
– J’avais froid et j’ai frappé. On m’a ouvert.
– C’est pas vrai.
– C’est vrai, ça fait deux jours.
– Non, car ça fait longtemps que l’on te connaît.

On me demande pourquoi j’ai été libéré à chaque arrestation, comme je ne réponds pas, elle me dit : « c’est grâce à nous ». J’ai été arrêté cinq fois ces derniers temps, dans trois villes différentes. Ils connaissent les dates d’arrestations. Je pense qu’ils me suivent depuis longtemps. Ils m’ont même libéré pour un vol.

-Tu n’as pas de travail, de logement de papiers? Si on te l’offre… tu fais quoi ?
-Qui me l’offre ?
-C’est nous, c’est l’Etat.

– Demain, tu peux gagner les papiers, un bon logement et 2000€/mois.
Celle qui me dit ça m’avait demandé si j’avais besoin d’un traducteur, elle m’a caché qu’elle parlait arabe jusque là.
– Pourquoi moi ?
– Mektoub ! (C’est écrit, c’est le destin)
– Ce sera quoi mon travail ?
– C’est pas dangereux : tu vois, tu captes, t’écris.

Ils m’expliquent que mon travail sera de visiter des endroits que je connais déjà et d’autres que je ne connais pas encore. Ils précisent que ça n’est pas dangereux.

Les trois flics me font signe de dire oui. Ils m’ont laissé le choix, mais en fait ils m’ont fait comprendre que j’étais obligé. Je dis : « ok si vous libérez mon pote. »
– Tu as un téléphone ?
– Non, mais je peux en avoir un aujourd’hui ou demain.
– On te laisse jusqu’à demain 11h pour venir avec un téléphone. Tu donnes ton numéro, on t’en donne un. Ce numéro personne ne doit le connaître, il est pour toi. Si tu fais ce numéro d’un autre téléphone c’est ta faute. Si tu racontes ça aussi, ce dont on a discuté doit mourir ici. Maintenant tu réfléchis jusqu’à demain 11h, tu es libéré.

Je lui demande où est mon pote, il disent qu’il va être libéré. Je descends, à la réception ils me disent que je sors dans 10 minutes. Ils appellent mon pote et lui disent qu’il peut sortir devant moi. Je prends mes affaires, la flique me dit d’attendre 10 minutes. Il sort. Elle dit que je peux sortir, me suit, me donne un nom, en disant que c’est le sien, en fait c’est celui d’une chanteuse, et elle me dit « demain, tu viens à la réception, tu donnes ce nom et ils t’emmèneront me voir. Si tu as le temps tu viens à 10h pour boire un café et discuter. »
– Pas de souci, à demain.

Je ne suis pas allé au rendez-vous, jamais. C’est impossible. On est pas venus pour acheter des papiers, on est venus pour gagner la liberté. Avec ou sans papier, ce n’est pas la police qui nous empêchera de continuer à lutter.
Face aux arrestations, à l’enfermement, aux expulsions, nous savons montrer notre solidarité, lorsqu’ils s’en prennent à l’un d’entre nous, c’est à tous qu’ils s’en prennent.

Ni soumission, ni collaboration, flics porcs assassins !

Des révoltés avec ou sans papiers