Au cours des dernières semaines, le gouvernement français a cherché désespérément à détourner l’attention de ses actions brutales à Calais, en ressuscitant la campagne de propagande contre les “dangereux” militants « No Border ».
Encore une fois, divers fonctionnaires – du ministre de l’Intérieur Cazeneuve en personne en passant par la Préfète Buccio et Bouchart la maire – se sont unis dans une chorale mensongère sur « No Border», reprise une fois de plus en chœur par les médias traditionnels.
Leurs discours oscillent entre l’idée que les « No Border » sont responsables des actes de violence, à celle qu’ils ne se soucient pas réellement des migrants de Calais, ou encore qu’ils s’activent à brûler des cabanes dans la jungle. Cette tactique est en réalité aussi prévisible que stupide. Chaque fois que les migrants osent se battre contre la répression et l’humiliation qui leur sont faites au quotidien, la réponse des autorités est la même: « les « No border » doivent les manipuler ».
Mais pour quelle raisons les autorités françaises continuent-elles leurs attaques contre les « No border » ?
– Tout d’abord, entretenir l’idée que les migrants pourraient se défendre, serait reconnaître que la cruauté et la répression de la politique frontalière à Calais se situe à un tel niveau, qu’elle forcerait la personne la plus conciliante à répliquer. Reconnaître que des personnes se défendent, c’est reconnaître qu’elles sont purement et simplement attaquées.
– Deuxièmement, au cours de l’année précédente s’est développé un intérêt et un soutien populaire sans précédent aux migrants de Calais. Pourtant, depuis plusieurs décennies, les gouvernements britannique et français se sont escrimés à chasser les migrants de la région, en utilisant impunément tous les moyens répressifs à leur disposition. Pendant ce temps là, les militants « No border » (Calais Migrant Solidarity) ont été témoins et ont documenté la destruction quotidienne des jungles et des squats. Si la répression n’est pas nouvelle, l’intensité de la solidarité et de l’intérêt pour cette situation l’est. Les mensonges et les histoires effrayantes à propos des « No Border » sont de grossières tentatives de division. Elles sont conçues pour dépeindre les activistes comme des fauteurs de troubles et retourner les migrants et les travailleurs humanitaires contre toute personne qui parle de résistance. Les autorités savent à quel point la solidarité est une menace pour le régime des frontières.
– Troisièmement, bien que Calais soit un lieu de tensions et de brutalité, avec des attaques fascistes commises par des groupes et des individus, l’immense majorité de la violence est perpétrée par la police avec l’utilisation quotidienne de gaz lacrymogène, de coups et la destruction des habitations. La frontière elle-même a fait de nombreuses victimes. Parler de violence des militants « No border » ou des migrants, n’est qu’un mensonge destiné à masquer la véritable violence, celle de de l’État et du régime frontalier. Le 2 mars 2016 la préfète Buccio a affirmé que les « No Border » « induisaient les migrants en erreur ». Les seules personnes qui trompent les migrants sont les autorités françaises et leurs collaborateurs qui ont affirmé, la semaine dernière, que l’expulsion de la jungle n’impliquerait pas la destruction au bulldozer des abris habités – une déclaration qu’ils ont contredite immédiatement dans la pratique ces derniers jours.
– Finalement les “No Border” incarnent un bouc émissaire parfait. Pourquoi ? Parce que « No Border » est un concept, il ne s’agit pas d’un groupe défini avec une forme d’adhésion particulière. Nombreux sont ceux qui partagent cette idée, y compris Calais Migrant Solidarity. Les autorités peuvent se permettre de désigner vaguement certains insaisissables manipulateurs de migrants, en sachant pertinemment qu’il n’y aura pas de réactions. Par exemple, au cours des derniers jours, il a été largement rapporté que cinq personnes avaient été arrêtées dans la jungle, et que certaines d’entre elles étaient des militants « No Border ». Les personnes arrêtées, étaient en fait trois membres d’organisations caritatives impliquées dans la jungle, et deux personnes iraniennes défendant leurs habitations. Elles ont toutes été libérées sans être inculpées, mais la réputation ,elle, restera.
Nous exhortons les gens à être aussi critiques face aux déclarations concernant les « No Border » qu’ils devraient l’être face aux promesses de l’État français d’une « expulsion humanitaire ». Informez-vous au-delà des médias traditionnels et, avant tout, soyons soudés contre la répression étatique à Calais.
[Publié le 4 mars 2016 sur Calais Migrant Solidarity.]