Ou comment la sécheresse se plaint de l’incendie…
Lieu Commun, Artist Run Space est une résidence d’artistes et un lieu d’exposition d’art « contemporain », qui occupe les locaux d’une ancienne usine textile [1] en plein coeur du faubourg Bonnefoy [2].
Ouvert en 2007 par la mairie de Toulouse et Jean-Cul Moudenc, l’alternance à « gauche » en 2008 n’aura pas remis en cause le soutien de la ville au Lieu Commun [3], ni le retour de Jean-Cul en 2014. Gageons également que si la liste Archipel Citoyen avait gagné les élections de 2020, le Lieu Commun aurait continué d’être soutenu (et financé) par la mairie.
Voici une liste des partenaires financiers du Lieu Commun :
- DRAC – Direction Régionale des Affaires Culturelles Occitanie
- Conseil Régional Occitanie Pyrénées – Méditerranée
- Conseil Départemental de la Haute-Garonne
- Mairie de Toulouse
- Agence du Service Civique
Depuis le premier confinement, le Lieu Commun a ouvert sa chaîne Youtube pour pallier à l’interdiction d’accueillir du public. On retrouve sur cette chaîne plusieurs vidéos qui dénoncent la gentrification du quartier Matabiau-Bonnefoy. On peut en voir ici un exemple.
La dénonciation de la gentrification se retrouve aussi dans des vidéos qui ne sont a priori pas « politiques », comme par exemple ici dans cette vidéo de la street artiste mondialement connue Mademoiselle Kat. On la voit déambuler de nuit dans le faubourg, collant ses oeuvres sur les murs, et faisant « non » du doigt aux pelleteuses qui détruisent les immeubles avenue de Lyon.
Si la mairie et les pouvoirs publics ont installé le Lieu Commun dans cette usine, c’est pour deux raisons : éviter que des personnes l’occupent illégalement (un squat), et… gentrifier le quartier.
A Paris, à New York, à Istanbul, Nantes ou Toulouse, la recette est la même, elle est bien connue : installer des artistes (de préference d’art « contemporain » ou de « street art ») pour faire grimper les prix du quartier, le rendre « attractif », et une fois la gentrification terminée, virer les artistes pour donner leurs locaux aux promoteurs immobiliers. C’est exactement ce qui est en train d’arriver à Mix-Art Myris [4]. Dans cette tambouille là, les artistes sont à la fois complices et victimes de la gentrification. Mais surtout complices.
A ce stade là, une question s’impose : les artistes du Lieu Commun sont-iels des imbéciles, ou se foutent-iels de nos gueules ? J’ose espérer que la première hypothèse est la bonne, parce que s’il s’agit de se foutre de nos gueules, nous qui sommes viré·es du quartier où nous sommes né·es, où nous avons vécu, où nous avons nos souvenirs, nos ami·es, notre famille, ce serait vraiment grave.
Vous voulez lutter contre la gentrification ? CASSEZ VOUS. Et laissez-nous vos locaux, nous saurons en faire bon usage.
P-S: Le quartier est infesté d’artistes-gentrificateurs, citons par exemple l’Atelier TA au 32 rue des Jumeaux, et l’Atelier L’Imagerie au 33 bis rue Arago (à deux pas du Lieu Commun). Ces trois ateliers/galeries d’artistes-gentrificateurs ont pour point commun d’être installées dans d’anciennes usines textiles, mais seul le Lieu Commun prétend lutter contre la gentrification.
Notes:
[1] Les chemises d’Armagnac.
[2] Au 25 rue d’Armagnac.
[3] En 2007, il s’agissait de 3 structures qui depuis ont fusionné pour donner donc « Lieu Commun ».
[4] Cheh!
[Publié le 27 mai 2021 sur Iaata.]