Mercredi 7 juillet 2021 a eu lieu l’expulsion du squat du 4bis avenue de la Révolution à Limoges, lieu de vie, d’activité et de culture pour les quelques 115 personnes exilé·e·s qui y vivent depuis plus de deux ans.
Cette décision, prononcée le lendemain de la fin de l’année scolaire, n’était aucunement une « fermeture » censée être plus digne qu’une expulsion et ce malgré les diverses annonces des autorités préfectorales qui feignent de privilégier cette option depuis que s’annonce la fin de la trêve des expulsions qui accompagnait l’état d’urgence sanitaire. Seymour Morsy, préfet du département avait pourtant déclaré lors des entretiens qu’il avait accordés aux collectifs (cultivant en cela la posture d’homme de dialogue qu’il cherche à s’inventer) qu’il avait retenu les leçons de l’expulsion du précédent squat et était ouvert aux propositions alternatives qui pourraient être faites. Parole de flic.
Ni le collectif des habitant·e·s, ni les collectifs de soutien, n’ont été consultés ou avertis malgré les multiples solutions concrètes qu’ils proposent depuis des mois. Les habitant·e·s avaient récemment demandé a être intégrés à la réflexion sur la fermeture du squat pour éviter une nouvelle situation de crise.
Pour fêter la fin de « la trêve la honte » consistant à éviter d’expulser des enfants en cours d’année scolaire, le dispositif répressif est énorme : 2 camions de gendarmes mobiles devant chaque entrée, la rue saint Martial bloquée de haut en bas toute la matinée, 4 bus de gendarmes mobiles dans la cour, la police nationale, la BAC, le sous-préfet Brach, le directeur de la citoyenneté D’Ardaillon et leurs personnels, la directrice de la DDCSPP Muller, la sous-directrice de l’OFII et son adjointe, les RG, les serruriers CAME, les huissièr·e·s SYSLAW et leurs stagiaires, les vigiles de la compagnie de sécurité FSI chargés de tenir le lieu après expulsion, et la protection civile. Plus de flics que d’habitant·e·s probablement.
À 7 heures, la police frappe à toutes les portes des habitations du squat, enfonce celles qui ne s’ouvrent pas, et annonce aux personnes qu’elles ont dix minutes pour sortir avec leurs affaires, que tout va être muré. Résultat : panique totale, puisqu’il faut déménager deux ans de vie en un instant. Les cartons s’amassent dans la cour, et les flics refusent d’ouvrir les portails pour autre chose qu’une sortie définitive, obligeant les personnes à passer tous leurs bagages très pesants par-dessus une grille de deux mètres cinquante pendant plusieurs heures.
Soudain l’huissière se décide à faire une déclaration aux quelques personnes désemparées présentes devant la grille : les habitant·e·s disposeront d’un délai de deux mois pour venir récupérer les biens qu’ils laisseront sur place après que sa boîte de vautours en ait dressé un inventaire complet (bonne chance). Trop tard semble-t-il pour éviter l’indignation de tout·e·s, de nombreuses crises de larmes, et le malaise d’une habitante transportée au CHU par la protection civile.
Les gendarmes mobiles, certainement là au cas où ces personnes en détresse tenteraient un coup de force au réveil, se tournent les pouces dans leurs carapaces en attendant de pouvoir manger leurs salades saupiquet. La police nationale continue de mettre la pression aux habitant·e·s, bien en mal pour gérer les annonces contradictoires des différents organisateurs de la fête. Certain·e·s flics confesseront une erreur de communication des autorités.
Du mépris oui.
Certain·e·s habitant·e·s, habitué·e·s à l’absurdité des situations qu’elles·ils traversent, prennent le temps de prendre une photo de groupe devant leurs voitures chargées à bloc, tout sourire malgré la police qui les presse. Les enfants, réunis en bande dans la cour, blaguent sur l’hôtel de luxe « qu’ils » vont construire après les avoir viré.
Pendant ce temps là, bien installés sur une table au milieu de la cour avec leur matériel, les hauts représentants de la Préfecture, de la DDCSPP et de l’OFII trient les habitant·e·s qui doivent décliner leur identité pour être orienté·e·s. Après avoir signé le formulaire de l’OFII proposant l’aide au retour volontaire au pays, unanimement refusée, le personnel de la préfecture étudie leurs situations administratives.
Sur plus de 110 personnes vivant sur place, une vingtaine d’adultes, avant tout des familles, sont en voie de régularisation et orientés vers différents hôtels de la ville. Le reste des personnes, ayant reçu des OQTF, parfois accompagnées d’IRTF d’un ou deux ans, ont été orienté·e·s vers un gymnase réquisitionné par la préfecture pour un hébergement d’urgence d’une nuit. Aucun dispositif de transport n’a été proposé pour aider les personnes à s’y rendre avec leurs affaires.
Les soutiens, maintenus à l’extérieur par les forces de l’ordre, accueillent les habitant·e·s qui sortent au compte goutte par la rue st Martial. La presse est également empêchée d’entrer et France 3 fait son direct au bord du boulevard.
Au gymnase Léon Blum (Sablard), la Croix-Rouge, qui déclare avoir été prévenue le matin même, fait son travail de courroie de transmission des autorités préfectorales, malgré la bienveillance de nombreu·ses·x de ses bénévoles. Des lits de camp sont dressés sous des barnums, pour maintenir un minimum d’intimité et de la nourriture est distribuée. Aucune information n’est donnée aux personnes qui s’y installent, sauf rumeur qu’ils peuvent dormir là une nuit. Les personnes ne savent pas ce qui peut les attendre le lendemain à la sortie du gymnase, beaucoup sont très inquiets, la plupart en galère administrative, et préfèrent choisir un hébergement solidaire pour la nuit.
Le 8 au matin, l’OFII revient au gymnase et propose à nouveau de signer pour l’aide au retour volontaire : une bourse de 650 €, un billet d’avion offert et un logement assuré en attendant le départ. Le chantage c’est : si tu ne signes pas, tu ne pourras pas rester au gymnase ce soir. L’OFII se cache dans un coin du gymnase, le plus loin possible des personnes en soutien qui accompagnent habituellement les habitant·e·s dans leurs démarches administratives. Les amis traducteur·trice·s ne sont pas accepté·e·s non plus.
Une liste des personnes ayant besoin de dormir une nuit supplémentaire au gymnase est transmise à La Croix-Rouge. Rien à faire, le centre ferme à 17h. Le Sous-Préfet est là pour dire aux personnes d’appeler le 115, s’assurer que tout le monde sort gentiment avant de s’enfuir en évitant les personnes à la sortie qui tentent de l’interpeller car tout le monde sait que le 115 est « saturé » et que les gens sont à la rue. Depuis, craignant la nécessité de devoir créer un campement, les soutiens se sont rassemblés chaque soir à 19h sur le parvis du CCAS, et depuis le dimanche 11 juillet au Champ de Juillet (le jardin public situé à côté de la gare). Les personnes souhaitant offrir de l’hébergement solidaire peuvent venir rencontrer les collectifs de soutien et les personnes sans solutions.
Hier soir (le 9 juillet), la police était là, sur le trottoir d’en face, en nombre, à observer la réunion. Malgré tout, les collectifs ne se sont pas laissés intimider et ont continué leur travail. S’assurer que les personnes vont bien, faire le lien avec les associations de maraude qui assurent la distribution de nourriture, mettre en lien les hébergeur·euse·s (même éloignés) et les hébergé·e·s, créer des temps de convivialité pour ne pas laisser faire les autorités dans leur travail d’étouffement et de division. Les réunions sont prévues tous les soirs.
Une équipe de coordination se met en place, tout cela est susceptible de changer mais il est pour l’instant possible d’envoyer un mail au collectif des habitant·e·s à cantoche [at] riseup [point] net.
Pour proposer d’accueillir une ou plusieurs personnes vous pouvez aussi contacter le 06.52.36.87.10.
Des ami·e·s du 4bis,
le samedi 10 juillet 2021
cantoche [at] riseup [point] net
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La Bogue, le 12 juillet 2021 https://labogue.info/spip.php?article1057