Le squat de la rue Mouron, à Calais, a été ouvert suite aux deux vagues de harcèlement policier et d’expulsions qui ont suivi l’élection de François Hollande, en mai – juin puis de septembre à novembre, l’an dernier. Il s’agit d’un vaste entrepôt séparé de la rue par une petite cour fermée par un grillage en mauvais état, et d’un petit préfabriqué sur un des côtés de la cour. Un important stock de boissons alcoolisées, principalement de bière, a été abandonné là par la dernière entreprise à avoir utilisé les lieux en 2007 au plus tard (2007 est la date de péremption inscrite sur les canettes de bière). C’est pourquoi ce squat a été baptisé « Beer House ».
L’entrepôt est occupé par des personnes originaires d’Afrique subsaharienne, principalement d’Afrique de l’est (Soudan, Somalie, Tchad). Ils sont actuellement entre 120 et 150, tous des hommes. Une partie d’entre eux sont des demandeurs d’asile. Quelques-uns sont mineurs. Le préfabriqué est habité par une cinquantaine de Syriens, tous des hommes, parfois aussi quelques mineurs. Ils ne veulent pas demander l’asile en France en raison des mauvaises conditions d’accueil et de la lenteur des procédures (ils ont souvent une famille à aider et parfois à mettre hors de danger en Syrie).
La mairie de Calais a pris un arrêté en avril dernier pour intimer aux propriétaires de nettoyer le lieu et de le clôturer en raison de son insalubrité, sans faire référence au fait qu’il était habité. Par la suite, la maire de Calais a plusieurs fois déclaré à la presse qu’une procédure était en cours pour son évacuation. Depuis une dizaine de jours, des fuites intentionnelles de la part de la mairie et de la préfecture annoncent une expulsion imminente. Aucune concertation n’a été ouverte avec les associations et les autres acteurs concernés, comme le prévoit la circulaire du 26 août 2012. Le dispositif régional d’accueil des demandeurs d’asile est saturé et la liste d’attente est importante, et le SIAO ne semble pas avoir été contacté pour un éventuel relogement des habitants.
Le lieu est régulièrement visité par les polices (police aux frontières et police municipale), qui entrent, prennent des photos, comptent les habitants, procèdent à des contrôles d’identité et parfois à des arrestations, bien qu’il s’agisse d’un lieu privé et du domicile des personnes qui l’habitent.
Il est aussi fréquenté par des jeunes qui ont tagué une partie des murs intérieurs, et par des voisins qui viennent s’approvisionner en bière gratuite.
[Publié le 1er septembre 2013 sur Vibrations migratoires.]