Assemblée générale des habitants et des soutiens ce mercredi en fin de journée à l’occupation Galou, les anciens locaux de l’entreprise Galloo abandonnés et occupés depuis le 12 juillet par des exilés et des militants. Derrière la passivité apparente, chacun s’est rapproché insensiblement, d’autres réagissent de loin. Le jugement concernant le lieu doit être rendu ce jeudi après-midi, incertitude donc d’ici-là. Les termes du débat sont posés, soit une décision d’expulsion sans délais, soit un délais pour rester dans les lieux. Dans un cas, que faire et où aller ? Dans l’autre comment mieux organiser la vie dans le lieu ? Quelques points de vue échangés, et date est prise jeudi en fin d’après-midi, après que la décision soit connue.
Un calme apparent, derrière lequel sourd l’inquiétude. À l’extérieur, le chaos continue à Calais. Tensions autour du campement qui s’est créé suite aux expulsions du 28 mai et du 2 juillet sur les terrains de l’usine Tioxide. Tensions autour du port, de ses accès, des parkings. Aux tentatives discrètes de monter dans les camions ont succédé des tentatives en groupes importants, souvent en plein jour, souvent sans passeurs, désorientant les contrôles habituels.
De plus en plus de voix disent qu’il faut essayer autre chose, que les expulsions à répétition ne solutionnent rien, voire qu’elles aggravent les problèmes.
Dans un premier temps, accueillir les gens dignement, leur permettre de se poser, d’accéder à l’information, de réfléchir leur projet. La tension baisserait nécessairement. Puis proposer aux personnes des possibilités de se poser de manière durable en Europe : elles ne sont pas venues jusqu’ici pour stagner dans un lieu d’accueil fut-ce le plus confortable, mais pour reconstruire leur vie en Europe, travailler, fonder une famille ou faire venir la leur si elle est restée en arrière. Sans solution durable, les gens continueront leur route, sous les camions puisque c’est la seule issue que les autorités leur laissent.
Aux autorités françaises de faire le premier pas, puisque ces exilés sont sur leur sol. Et qu’on ne dise pas qu’on ne sait trouver des solutions pour quelques centaines de personnes, alors que des pays pays bien plus pauvres accueillent des centaines de milliers ou des millions de réfugiés. Puis, par cercles concentriques, impliquer les autorités britanniques et l’Union européenne dans la recherche de solutions plus globales.
[Publié le 24 juillet 2014 sur le blog Passeurs d’hospitalités]
OCCUPATION GALOU : JOUR DE PROCÈS
Un cour de français se termine dans la cour de l’ancienne usine Galloo occupée depuis dix jours par des exilés et leurs soutiens. Beaucoup de monde est rassemblé tout autour, des habitants du squats, mais aussi des exilés habitant les campements de la périphérie, qui viennent l’après-midi se laver, recharger leur portable, profiter d’un moment de répit, voir des amis. Les tables et les chaises apportées par Emmaüs participent à la convivialité de l’espace. L’équipe de cuisine a fini de préparer le repas, chacun va chercher une assiette – sauf les personnes qui respectent le jeûne du ramadan, qui partageront elles le repas à la tombée de la nuit. Plus loin des bâtiments, Médecins du Monde installe une troisième grande tente pour accueillir les nouveaux venus, des exilés se lavent ou lavent leurs vêtements.
C’était un jour un peu particulier pour l’occupation Galou. Onze personnes, exilés et soutiens, avaient donné leur identité comme habitants du lieu et étaient convoqués au tribunal d’instance ce matin dans la cadre d’une procédure en référé (en urgence) pour décider d’une expulsion éventuelle. Une cinquantaine de personnes étaient rassemblées devant le tribunal en soutien. Le jugement est mis en délibéré, et sera rendu jeudi après-midi. Encore deux jours de suspens pour savoir si le lieu risque une expulsion immédiate ou s’il y aura un délais.
L’audience a duré plus d’une heure, suite à quoi la juge s’est rendue sur les lieu constater par elle-même, accompagnée par les avocats des deux parties (propriétaire et habitants). Cela tranche heureusement avec les habitudes du tribunal d’instance de Calais. D’habitude, un huissier vient constater l’occupation du lieu et demande en français leur identité à des exilés qui ne comprennent pas. Comme l’identité des habitants n’est pas établies, ils ne sont pas convoqués au tribunal et le jugement se fait sans débat contradictoire. Les juges reprennent un quasi copié-collé de la requête du propriétaire, même s’ils n’ignorent pas le contexte calaisien et les droits des habitants des squats, demandeurs d’asile, mineurs, personnes en détresse sociale, droits qui devraient pondérer leur jugement.
Un autre procès avait lieu cet après-midi, au tribunal de grande instance de Boulogne/Mer. Il y a deux mois la police fait irruption dans un squat. Le délais de flagrance est passé, différentes preuves dont un contrat EDF l’attestent. Peu importe, les personnes présentes sont arrêtées, placées en garde-à-vue, puis libérées sans charges. Sauf deux militants qui ont refusé le prélèvement de leur ADN et de leurs empreintes digitales, ne voulant pas être fichés en raison de leur engagement. Journée chargée au tribunal, à 21h ils n’avaient pas encore comparu.
[Publié le 22 juillet 2014 sur le blog Passeurs d’hospitalités]