En Janvier 2022, une personne étrangère qui étudie en France et qui vit dans une autre région que la nôtre, a été convoquée par le Capitaine Ribery pour répondre à de questions à propos de trois de nos camarades, qui sont des réfugiés politiques. Lui et son collègue ont aussi posé une question sur un camarade qui a un procès politique à l’étranger et à propos du Marbré, un squat d’organisation à Montreuil.
Pourquoi partager cette expérience
Nous choisissons de publier cette information pour partager notre expérience avec les prochaines personnes qui seront approchées par les flics. Pour participer à diffuser des réflexes de défense collective pour préserver nos mouvements. Et pour pousser les autres à publier aussi quelque chose la prochaine fois que ça arrivera.
Une amie est convoquée pour profilage
En Janvier 2022, une amie de camarades qui vit dans une autre ville a été convoquée par le « capitaine Ribery » au commissariat, sans aucun motif. Elle les a appelés pour connaître la raison de la convoc, mais ils n’ont pas voulu la lui donner. Lorsqu’elle arrive, le flic du commissariat local ne savait pas qu’elle était convoquée, mais un autre flic l’a approchée. Il lui a dit qu’il travaillait dans toute la France, et qu’il était venu spécialement pour lui parler.
Deux flics l’ont interrogée. Ils avaient un fichier avec son nom et prénom. Ils lui ont d’abord posé des questions à propos d’elle : les raisons de son séjour en France, pourquoi elle avait choisi ce pays, ses plans pour le futur, où vivra-t-elle lorsqu’elle aura fini ses études, où travaillera-t-elle, où a-t-elle voyagé en France, a-t-elle des problèmes avec la loi dans d’autres pays, si elle a des amendes en retard, si elle a d’autres problèmes avec la police…
Ils lui ont dit qu’ils allaient lui montrer les photos de trois personnes et lui poser des questions. Ils lui ont demandé si elle les connaissait, quels étaient leurs noms. Vivent-ils en France ou en Belgique. D’où et depuis combien de temps les connaissait-elle. Pourquoi étaient-ils venus dans sa ville. Ils ont demandé si ils avaient des trucs spécifiques à faire ici, ou si ils étaient juste venus la voir. Les flics savaient qui était venu dans sa ville et quand. Ils ont demandé combien de temps ils étaient restés et quand étaient les dernières fois qu’elle s’était rendue à Paris et à Bruxelles. Ils ont voulu qu’elle décrive les tatouages de l’un de nos camarades. Ils ont demandé si ils avaient des caractéristiques particulièrement reconnaissables. Ils ont demandé si ce camarade avait des problèmes avec la loi en France. Ils ont demandé les noms de ses parents et de son copain.
Lorsque qu’elle est venue en France la dernière fois, début janvier, alors qu’elle était dans la zone de contrôle des passeports, le vigile a pressé un bouton et la sécurité s’est approchée d’elle et l’a fouillée ainsi que ses bagages. Une semaine plus tard, la même situation est arrivée à son copain.
En général, elle n’a donné aucune info à part sur elle, ses plans, ses motivations, et qu’elle les connaissait, car elle pensait que c’était inutile de le nier. Pour le reste des questions, elle a répondu qu’elle ne savait pas.
Si l’on est convoqué
Tout le monde peut-être convoqué par les flics, par lettre, en personne, par téléphone. Ils peuvent aussi profiter d’autres convocations (à la préfecture par exemple), pour essayer de parler avec nous. En règle générale, pour notre sécurité et celle de nos camarades, c’est mieux d’éviter toutes les interactions avec les flics. Il vaut mieux ne donner aucune preuve que nous avons reçu la convocation. Le mieux reste de ne pas ouvrir la porte aux personnes inconnues, de ne pas répondre au téléphone. Et si ils arrivent à nous rencontrer en personne pour nous donner un papier, ne pas le prendre, ni signer quoi que ce soit.
Dans tous les cas, en France, une convocation devant la police n’est pas un acte de justice, elle n’a pas de pouvoir légal. Surtout, rappelons-nous qu’on n’est pas obligé.e de s’y rendre. On peut voir ça de la manière suivante : nous recevons simplement l’information que les flics veulent nous voir. Soit.
Si ils nous convoquent, ça peut vouloir dire de différentes choses. Par exemple, ils veulent juste qu’on leur donne des informations sur nos camarades. Ils peuvent nous convoquer et profiter de la situation pour demander nos empreintes. Il est arrivé plusieurs fois qu’après avoir totalement ignoré les flics qui les convoquaient pour continuer une enquête, les flics lâchent juste l’affaire. Donc, ne pas aller à une convocation nous laisse la possibilité de n’être impliqué.e dans aucune procédure du tout.
Dans tous les cas, si les flics veulent réellement nous voir, ils trouveront un moyen de nous arrêter chez nous, dans la rue, ou lorsque que nous aurons une autre convocation (au tribunal par exemple). Et pour nous perquisitionner, ils ont besoin d’un magistrat qui valide la perquisition, et c’est aussi notre job de rendre leur merde plus difficile pour eux.
Si nous sommes malgré cela en face d’un flic
Si l’on reçoit une convocation, nous pouvons en parler avec d’autres camarades ou joindre un collectif anti-rep pour avoir des conseils si besoin.
Tout ce que l’on dit pourra être utilisé contre nous et nos camarades, même si c’est en dehors d’un
interrogatoire (dans les couloirs, dans la rue, à la maison). Donc, restons calmes et prenons le temps de réfléchir avant tout. Il faut dire que ce n’est pas la même chose de dire « Je ne sais pas » et « Je garde le silence ». Ne rien déclarer est un droit en France, et nous devons l’utiliser absolument. Dire « je ne sais pas », « je ne me souviens pas » c’est dire quelque chose. Peut être que les flics ont des preuves qu’on le sait, et vont le révéler après, foutant la pression disant que l’on mentait. Donc, on peut juste confirmer notre identité si on le veut, et pour tout le reste, choisissons de ne rien déclarer. Se taire est aussi un moyen de ne pas avoir des centaines de questions dans nos têtes : nous savons ce que nous faisons, et ceci est la manière la plus sure d’être pour nous tou-tes.
Le travail des flics est de nous faire parler pour nous charger nous ou d’autres. Répondre à leurs questions est non seulement dangereux pour nous et nos camarades, mais cela peut mener à une collaboration informelle. Si nous donnons une information, ils nous verront comme une personne qui peut leur en donner plus. Ils peuvent nous foutre encore plus la pression, ou utiliser une forme de chantage. Le truc, c’est qu’ils vont rarement nous demander de travailler pour eux formellement. Il n’y a pas de frontière claire entre répondre à leurs questions et être une balance.
Si nous avons le sentiment que les flics tentent de nous recruter comme balance, nous devons trouver une manière de mettre fin à ce processus le plus rapidement possible. Arrêter de répondre aux questions. En parler le plus rapidement possible aux camarades pour protéger notre confiance. Le rendre public. Les flics peuvent organiser des rencontres avec nous si ils pensent que nous voulons collaborer. Nous pouvons y aller avec une dizaine de camarades pour briser ce processus informel.
Gardons à l’esprit que les flics n’approchent pas nécessairement des personnes au hasard. Ils choisissent en général des personnes qu’ils identifient comme faibles. Par exemple, les sans papiers, les utilisateurices de drogues, des personnes en galère de tunes, ou ayant des problèmes avec la justice. Ils utiliseront n’importe quelle faiblesse pour nous faire chanter, nous manipuler, et avoir un moyen de pression sur nous. Rappelons nous aussi que les récompenses comme avoir des papiers par exemple, n’arrivent quasiment jamais. C’est leur moyen de pression, ils n’ont donc aucun intérêt à donner ce qu’ils ont promis.
Voir aussi:
Quelques histoires d’infiltrations et de balances en Europe depuis quinze ans
https://iaata.info/Quelques-histoires-d-infiltrations-et-de-balances-en-Europe-depuis-quinze-ans-3548.html
Et une affaire plus récente:
Besançon: Y a pas que leurs outils de techno-surveillance dans nos vies, y a les poukaves aussi
https://lille.indymedia.org/spip.php?article33820
[Publié le 2 février 2022 sur Indymedia-Lille. Traductions disponibles en anglais et en russe sur cette même page.]