Le propriétaire du bois, Fabricom, possède depuis le 2 septembre 2008 un permis d’abattage. Par l’action qu’ils mènent, les activistes qui opèrent au sein du réseau GroenFront! ne protestent pas seulement contre les abattages dans le bois du Lappersfort; il s’agit pour eux d’un dossier emblématique des dix mille hectares boisés en Flandre qui ne sont pas désignés comme tels sur les plans d’aménagement du territoire et qui sont menacés à court terme. Les activistes fustigent aussi le comportement hypocrite et politicien de la ville de Bruges et des pouvoirs publics flamands. Ils jugent absurde que les tout derniers vestiges de forêts en Flandre doivent céder la place à des zones industrielles alors que plus de 30% des terrains désignés en Flandre comme industriels sont inutilisés et que, rien qu’à Bruges, une soixantaine de bâtiments industriels sont vides. En outre, les activistes veulent inscrire l’ensemble du dossier dans le cadre de la crise socio-écologique mondiale, crise dans laquelle Fabricom a une part de responsabilité.
Un bois dont l’intérêt écologique est indéniable mais qui n’est pas désigné comme tel sur les plans d’aménagement du territoire
Le permis d’abattage autorise Fabricom, au terme d’une période d’attente de vingt-cinq jours (à compter du 2 septembre), à réduire le bois de 3,5 hectares. Comme cette partie du Lappersfort est désignée comme terrain industriel, l’usage actuel du terrain (en l’occurrence un bois) n’est pas conforme au plan de secteur (Ruimtelijk Structuurplan Vlaanderen). À cause de ce décalage entre la valeur écologique réelle de terrains et la destination qui leur a été donnée par des fonctionnaires qui n’ont pas quitté leur bureau, plus de quarante mille hectares de forêts flamandes ne sont pas désignés comme tels sur les plans d’aménagement du territoire. C’est plus d’un quart de la superficie boisée en Flandre! Dix mille hectares, soit près de quatre millions d’arbres, sont menacés à court terme.
La valeur écologique de la zone dont l’abattage est prévu dans le bois du Lappersfort n’est pas négligeable. La nature a totalement repris ses droits sur ce site jadis bâti. La superficie qui doit être abattue fait office de zone tampon entre le bois et l’industrie Bombardier. De surcroît, l’aménagement de nouveaux terrains industriels affectera fortement la valeur écologique du bois contigu.
Bruges et l’hypocrisie
Le mercredi 3 septembre 2008, la ville de Bruges a coupé 1,2 hectare le long de la Vaartdijkstraat, l’ancien chemin de halage le long du canal de Bruges à Gand. Bruges veut élargir ce chemin dans le cadre de son projet de désenclavement de la ville par le sud. Elle ouvre ainsi littéralement la voie au trafic poids lourds qu’engendrera l’aménagement du terrain industriel de Fabricom. La ville de Bruges trompe la population en assurant que les arbres sont abattus pour permettre l’aménagement d’une piste cyclable large et sûre, sans dire un mot des poids lourds qui emprunteront désormais cette route.
Le comble de l’hypocrisie a été atteint le mardi 2 septembre. Au moment même où une armée de 250 agents de police mobilisée par le bourgmestre Moenaert bloquait l’accès au Lappersfort et à la Vaartdijkstraat pour que les bulldozers et les tronçonneuses puissent procéder tranquillement aux abattages, le même Moenaert signait à Bruges, au conseil communal, l’acte de vente d’une autre partie du bois. L’administration communale de Bruges et la Région flamande ont ainsi racheté à Fabricom une partie du bois et Moenaert a pu se présenter comme le bienfaiteur et le sauveur de la majeure partie du bois. L’achat de ces terrains ne les préserve toutefois d’aucun abattage puisque neuf hectares étaient déjà désignés sur les plans d’aménagement comme zone boisée et les quatre autres, comme zone PME.
Fabricom
Fabricom GTI (Belgique) et Suez GTI (Pays-Bas) ne sont qu’une seule et même société, filiale de Suez Holding. Ce groupe français a jadis été créé pour financer la construction du canal de Suez. Il connaît une forte croissance, surtout depuis quelques années. GTI signifie Groep Technische Installaties. Cette entreprise déploie ses activités entre autre dans le domaine de l’automatisation, de la sécurisation, des canalisations, des tunnels, des installations offshore, des installations de détection d’incendie, de l’éclairage d’aérodrome, des installations au gaz et des télécommunications.
En janvier 2008, Total E&P Nederland et Fabricom Oil & Gas, filiale de Suez, ont conclu un contrat d’ingénierie pour 21 plates-formes de forage offshore en mer du Nord, dans les eaux néerlandaises. En mai 2008, un consortium mené par Fabricom GTI a décroché un contrat de 250 millions d’euros pour l’approvisionnement d’une centrale électrique au gaz à Eemshaven aux Pays-Bas.
Suez a une participation dans l’entreprise de gestion des déchets SITA. En 1997, Suez fusionne avec la Lyonnaise des eaux; en 2006, Suez Holding achète Gaz de France. Un an avant, en 2005, Suez reprenait le fournisseur belge d’énergie Electrabel, qui fait partie des entreprises qui veulent construire une nouvelle centrale au charbon aux Pays-Bas. Par ailleurs, Electrabel est tristement célèbre pour son piètre mix énergétique: 55,3% de son énergie est d’origine nucléaire et 43,5% provient de combustibles fossiles. 1,2% seulement a une origine durable.
Suez Holding procède à des acquisitions à grande échelle dans le secteur de l’énergie. Les raisons qu’ont les activistes belges et néerlandais de GroenFront! de réoccuper cette partie du Lappersfort vont donc bien au-delà de la préservation de quelques arbres. Par cette action, ils veulent non seulement souligner l’absurdité de la législation belge en matière d’aménagement du territoire, mais aussi dénoncer les abus globaux qui y sont associés.
Histoire de la lutte
Le camp d’action au Lappersfort a débuté le 7 août 2001. Le Groene Gordel Front (GGF) a été créé 250 jours plus tard. Le 14 octobre 2002, les occupants du bois sont expulsés. Les violences policières choquent. Quelque cinq mille personnes indignées, dont de nombreuses familles avec enfants, manifestent à Bruges pour dire leur désaccord avec les projets de Fabricom et du bourgmestre Moenaert. Treize activistes qui ont participé au premier camp d’action risquent toujours une amende de cinquante mille euros. S’ils pénètrent à nouveau dans le bois, Fabricom leur réclamera les coûts de l’expulsion d’il y a cinq ans. Les autorités essaient par ce biais d’empêcher de nouvelles actions. Heureusement, il y a suffisamment d’autres activistes prêts à reprendre le flambeau.
GroenFront!
GroenFront! n’est pas une organisation mais un réseau au sein duquel des militants écologistes radicaux venus d’horizons divers et mouvants pratiquent l’action directe. C’est la branche néerlandophone du mouvement britannique Earth First! En pratique, le recours à l’action directe n’est en général envisagé que lorsque d’autres moyens (par exemple juridiques) ont été épuisés. GroenFront! est organisé de manière horizontale, n’a pas de liste de membres ni d’administration, et ne reçoit pas de subventions. Le matériel (pour grimper) est financé par des dons et des soirées de soutien.
Pour contacter les occupants
Ces numéros de téléphone sont à votre disposition pour toutes vos questions (en néerlandais): 0475 96 82 61 (contact presse dans le bois) 0471 65 85 75 (contact presse à l’extérieur) Vous pouvez également envoyer un mail à lappersfort[at]gmail[dot]com. Il est préférable de nous avertir à l’avance si vous voulez nous rendre visite dans le bois occupé; vous serez ainsi certain de trouver un interlocuteur prêt à répondre à vos questions.
Rejoignez l’occupation!
Es-tu prêt(e) à venir donner un coup de main au Lappersfort? Génial! Toute aide est la bienvenue! N’oublie pas de consulter d’abord la liste des objets à emporter, l’itinéraire pour rejoindre le bois et quelques informations d’ordre général.
Soutenez-nous!
Votre soutien financier est le bienvenu pour nous aider à mener à bien cette action! Merci d’avance! Vous pouvez faire un don sur le compte 001-3502025-13 (communication: Lappersfort).
Matériel
Si vous souhaitez offrir un soutien matériel, vous pouvez nous apporter dans le bois: – des bidons d’eau – des bonbonnes de gaz – des tapis (pour protéger les troncs) – des cordes polypropylène de 12 et 6 mm de section – des bâches – des poutres / des planches / du contreplaqué – des charnières – des tubes d’échafaudage – du plexiglas – des fenêtres (avec chambranle) – des forets – des mèches – des vis – du ruban adhésif – des clous – du matériel pour grimper (harnais d’escalade, mousquetons, huits, cordes d’escalade) – des perceuses à main – des perceuses sur accu – des pieds de biche – des mètres ruban (plusieurs longueurs) – quelques marteaux – une hache pour fendre le bois (qui ne tombe pas sous le coup de la loi sur les armes) – d’autres outils – des banderoles (apporte la tienne, nous la suspendrons) – chargeur et multimètre – transformateur 12v DC –> 230v AC – photopile – papier toilette
Trouvé sur: cemab.be (contient des liens vidéo et des photos).
Site (en néerlandais).
lappersfort[at]gmail[dot]com