São Paulo (Brésil): Rien à revendiquer, tout à détruire (19 juin 2014)

Le mouvement « Un pass libre » appelait à manifester dans les rues de Sao Paulo ce jeudi 19 juin pour célébrer l’anniversaire de l’abandon de la hausse des tarifs des transports obtenu suite aux manifs de masse de l’été dernier. Les revendications du jour étaient entre autre des transports publics gratuits et la réadmission des 42 travailleurs du métro licenciés pour s’être mis en grève plusieurs jours avant le début du Mondial. Au programme, le mouvement avait prévu une « fête sauvage », avec barbecue, théâtre, rap et football. Selon les autorités, 1.300 personnes se sont rassemblées avenue Paulista vers 15h (les organisateurs parlent de 6.000 participant-es), mais la plupart a saisi l’occasion de protester contre la Coupe du monde plutôt que de demander un meilleur service de transport. Un bon cortège de manifestant-es masqué-es était présent, ainsi que des Indiens aux visages peints et armés d’arcs et de flèches, appelant à la démarcation des terres autochtones.

La marche fut sauvage avant puis après l’arrivée des flics. Vers 19h, Un concessionnaire Mercedes-Benz s’est fait exploser sa façade et à l’intérieur, toutes les berlines de luxe ont été défoncées à coups d’extincteurs, des panneaux de signalisation ont été arrachés. Au moins quatre agences bancaires ont été attaquées (dont une succursale de la Banque du Brésil et une autre de la Citibank, avenue Rebouças). Un véhicule de TV Gazeta, ainsi que des bornes de location de vélos du système Bike Sampa[*] n’ont pas été épargnés.

En début de soirée, les flics ont rappliqué en gazant massivement et visant au flashball. Des manifestant-es adoptant la tactique black bloc ont alors érigé des barricades à travers les rues du quartier Pinheiros et attaqué les agents de la Police Militaire (PM) avec des pierres et feux d’artifice. Vers 20h30, la circulation des rues n’était toujours pas rétablie et des barricades de poubelles finissaient de crâmer. Au milieu de pots de fleurs et vitres de cabines téléphoniques brisés sur le sol, plusieurs slogans anarchistes ont été tagués sur les murs durant la manif.

Les compagnon-es qui voulu exprimer concrètement leurs désirs de destruction ont dû faire face aux organisateurs. Ceux-ci se sont placés devant les façades de plusieurs agences bancaires en s’improvisant vigiles et ainsi suppléer les flics qui n’étaient pas là… En fait on apprend après coup que cette manif a été organisée conjointement avec la PM. Quelques jours avant cet événement, le mouvement « Un pass libre » a envoyé une lettre à la police (sic!) en leur demandant de se mettre à l’écart, tout en leur fournissant la date, le lieu du rassemblement et l’itinéraire de la manif… Suite aux attaques et destructions lors de cette manif, un gradé de la maison poulaga répond au mouvement « Un pas libre » lors d’une conférence de presse en déclarant « nous vous avons donné notre confiance et vous nous avez trahis » (sans blague!). Bref, un bel exemple de collaboration de classe !

[*] Semblable au fonctionnement d’un Vélib’ parisien, Bike Sampa a été mis en service fin mai 2012 à Sao Paulo et compte près de 60 bornes. Ces jouets pour bobos sont financés et gérés par la banque Itau, qui est également sponsor de la Coupe du monde de football.

Reformulé depuis la presse brésilienne, 19 juin 2014.

[Publié le 20 juin 2014 sur le Chat Noir Émeutier.]

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