Madrid (EFE), 1er juin 2015 – L’Audiencia Nacional a remis en liberté trois membres supposés des Groupes Anarchistes Coordonnés (GAC) arrêtés en avril dernier au cours de l’opération Piñata[1], arguant que le juge Eloy Velasco n’avait pas suffisamment motivé l’envoi en prison pour délits d’appartenance à une organisation terroriste.
Javier García Castro, Enrique Balaguer Pérez et Jorge Linares Izquierdo avaient fait appel de cette mesure. Leur remise en liberté se fonde sur le « manque de caractère concret des indices » (vu notamment l’aspect générique des degrés d’implication dont ils sont accusés) et sur le fait qu’il n’y a pas de risque sérieux de fuite vu leurs attaches familiales et salariales en Espagne.
Par ailleurs les juges affirment que les liens ne sont pas établis (prouvés) entre les GAC et la Fédération Anarchiste Informelle (FAI), considérée comme terroriste par la l’Union Européenne.
Les trois anarchistes sont néanmoins placés sous contrôle judiciaire avec obligation de pointer [tous les 15 jours], retrait du passeport et interdiction de sortir du pays[2].
Notes:
[1 ]Ndt – Qui a conduit le 1er avril 2015 à 15 mises en examen (10 à Madrid, 3 à Barcelone et 2 à Palencia) pour « association terroriste » à caractère « anarchiste insurrectionaliste », dont cinq (et maintenant deux) incarcérations préventives. Ces cinq compagnons avaient commencé à être transférés le 18 mai dans différentes prisons loin de Madrid (dont Enrique il y a quelques jours à peine de Madrid à Villena, Alicante).
[2] On remarquera avec joie que contrairement aux sept compagnons de Catalogne de l’Opération Pandora relâchés contre le paiement d’une caution de 3000 euros par tête fin janvier 2015, aucun racket étatique de ce type n’a été imposé à ces trois-là.
[Dépêche de presse traduite de l’espagnol par les Brèves du Désordre.]
Pour l’opération Piñata, il reste donc deux compagnons dedans, auxquels on peut écrire :
PAUL JARA ZEVALLOS
Centro Penitenciario Madrid VII, Estremera
Carretera M-241, Km. 5750
28595 – Estremera
(Madrid)
JAVIER GRIJALBO ADÁN
Centro Penitenciario Zaragoza
Autovía A-23, Km. 328
50800 – Zuera
(Zaragoza)
Espagne : l’anti-terrorisme séquestre les comptes bancaires ouverts pour la solidarité avec l’Opération Pandora
Par un arrêt de l’Audience Nationale nous avons pris connaissance de l’ordre, signé par le juge Eloy Velasco et sollicité par la Brigade d’Information de la Police Nationale, de bloquer et de saisir les comptes solidaires ouverts les jours suivant les arrestations [de décembre 2014].
Un nouveau chapitre s’ouvre dans cette farce de l’État espagnol contre le mouvement anarchiste, visant en l’occurrence à étouffer les gestes de solidarité matériels et économiques, mais aussi affectifs avec les entourages réprimés.
Comme nous le savons bien, la répression, dans ce cas avec le paquet de punition et d’intimidation connu sous le nom d’“antiterrorisme” (qui concerne un spectre toujours plus large et ne va cesser de s’étendre) comprend le châtiment classique et physique avec l’enfermement, l’isolement, l’absence de communication et la torture, complété —et en cela l’État espagnol est à l’avant-garde— par la punition des proches des prisonniers avec leur dispersion sur le territoire et les limitations de contact avec l’extérieur.
A cela viennent encore s’ajouter l’envoi de messages (tantôt sporadiques et subliminaux, tantôt constants et explicites) : il n’y a pas de proches et d’amitiés, mais de “ténébreux réseaux” ; il n’y a pas de compagnons et de compagnonnes, mais des complices.
Que cherchent le pouvoir et la répression avec cela ? A user et affaiblir les prisonniers et prisonnières, ainsi que leurs entourages affectifs et politiques. A faire en sorte que tout le poids de la loi et la répression les écrase.
Ils sont conscients qu’il existe une force beaucoup plus puissante et effective qui dépasse tout le béton et l’acier qui constituent les prisons. Cette force est symbolique.
“Si tu es ami des terroristes, tu es terroriste” est un de leurs messages. A mi-chemin entre la lèpre et la sorcellerie, le diagnostic et l’accusation de terrorisme cherchent à faire peur.
Une fois de plus, le dompteur de lions, fouet en main, ouvre les rideaux de son cirque et nous invite à y entrer — de manière forcée bien sûr. A qui le tour de mettre sa tête dans la gueule du lion ou sous la patte de l’éléphant ? Qui, homme ou femme, mettront-ils dans un canon pour l’envoyer dans une cage la plus éloignée possible ? Qui les bouffons de la brigade d’information de la Police Nationale vont-ils mettre sous enquête et prendre en filature ? Et les cracheurs de feu des médias, contre qui vont-ils lancer leurs bouffées de venin ? Qui les mages de l’Administration Pénitentiaire vont-ils mettre dans une boite et couper en deux ? En plus d’être humiliants, les spectacles du cirque classique sont très prévisibles.
Pour en revenir aux blocages et aux saisies des comptes bancaires, le juge ordonne en outre d’enquêter sur les mouvements financiers, les titulaires des comptes, les transferts, etc. Qu’est-ce qu’il croit que nous faisons avec l’argent, que nous l’envoyons en Suisse comme ses amis politiques et spéculateurs ?
Malheureusement, une des contradictions et peut-être aussi une des erreurs les plus grandes a été de créer un compte bancaire pour faire face aux dépenses provoquées par la répression, et principalement à la possibilité de devoir récolter rapidement de l’argent provenant d’individus et de collectifs solidaires de différents endroits, par exemple pour payer une possible caution (ce qui s’est passé un mois et demi plus tard), ainsi que pour subvenir aux dépenses occasionnées par le fait d’avoir plusieurs compagnons derrière les barreaux (avocats, mandats et voyages pour les visites).
Nous pensons qu’il est important de diffuser cela aux compagnons qui ne sont pas concernés directement, afin qu’ils sachent et voient avec ce nouveau pas vers où va la répression. Il faut signaler que des procédures de ce genre sont déjà utilisées contre d’autres secteurs également sous le coup de l’“antiterrorisme”. Qu’ils sachent aussi qu’à partir de maintenant, il n’existe plus aucun numéro de compte en solidarité avec les compagnons et compagnonnes anarchistes.
Il est important que ces nouveaux pas de la répression ne parviennent pas à nous affaiblir et à nous effrayer et que nous puissions en apprendre quelque chose.
Liberté pour les anarchistes emprisonné-es !
S’ils touchent aux un-es, ils touchent à tou-tes !
Barcelone, 1er juin 2015.
[Traduction de l’espagnol par les Brèves du désordre, d’un article publié sur Indymedia-Barcelone le 1er juin 2015.]