Ce mardi 26 juillet, après des années de lutte et deux ans d’occupation, les habitant-e-s du foyer CARA à Saint-Ouen ont été expulsé-e-s. Prévenu-e-s moins de 48 heures à l’avance, ils et elles ont dû quitter leurs chambres à 5h du matin en laissant derrière eux-elles leurs meubles, leurs affaires, leurs souvenirs. Des hommes, des femmes et des enfants, français ou étrangers, avec ou sans papiers, ont été mis à la rue par les CRS. En guise de relogement, quelques nuits d’hôtel, dispersé-e-s à travers la région parisienne.
Hier soir, en guise d’annonce d’expulsion, les occupant-e-s ont constaté la présence de parpaings à proximité du foyer. La rumeur courait depuis plusieurs jours, mais cela confirmait les inquiétudes, à savoir que c’était pour ce matin.
Le Foyer CARA, « bijou de famille » de Saint-Ouen selon le maire UMP [LR], a vu défiler entre ses murs des milliers de personnes venues tenter leur chance en France ou en région parisienne en ses 30 et quelques années d’existence.
Plus qu’un foyer : un lieu de vie !
C’était également un lieu de vie démocratique à Saint-Ouen. L’atelier de vélo solidaire, une association de danse hip hop y menaient leurs activités. Des organisations politiques, féministes, y tenaient meetings, réunions, soirées.
Depuis deux ans et demi, la situation s’est détériorée. La mairie précédente avait la volonté de fermer le foyer et l’actuelle a laissé pourrir la situation. L’association est entrée en cessation de paiement. Les résident-e-s ont été abandonné à leur sort. Le foyer a été occupé à l’hiver et au printemps 2014, 150 personnes avaient alors été expulsées par des vigiles payés par l’OPHLM. A l’automne dernier, le DAL Paris a occupé le foyer, remplissant la tour, qui devait compter 300 habitant-e-s à son expulsion.
Expulsion manu militari et garde à vue
Ce matin, à 6 heures tapantes, plusieurs groupes de CRS sont entrés dans le foyer, ont frappé aux portes et demandé aux gens de dégager. Ça leur a pris un sacré moment bien entendu de faire les 14 étages. Des gens sont resté-e-s longtemps à l’intérieur du foyer, et l’un a été arrêté et placé en garde à vue.
Nous avons pu rentrer un moment rechercher nos affaires restées en haut, mais avons du laisser beaucoup derrière nous. Nous n’avons pas eu le droit aux petits déjeuners des expulsion médiatisées des camps de migrant-e-s.
256 personnes étaient sur la liste de la préfecture datant de plusieurs mois. Un certain nombre est resté sur le carreau. Des officiels étaient là pour attribuer des hôtels et organiser des transports en cars de la police.
Une prise en charge aussi restreinte que sélective !
Les résident-e-s, les familles rroms expulsées du village d’insertion l’année dernière, les adhérent-e-s du DAL, les migrant-e-s ont été dispersés entre le 93, le 77 et le 95. Les mineur-e-s isolé-e-s ont été pris en charge. Les personnes âgées et femmes enceinte auront le droit à un mois d’hôtel, les autres jusque vendredi…
Quelle honte de voir ces familles, ces mères, ces enfants, ces jeunes, expulsé-e-s de chez eux ! La mairie n’a pas daigné pointer le bout de son nez, quant à l’OPHLM, propriétaires des murs, un de ses gros bras était là pour le représenter.
C’est le procès intenté à l’association CARA qui a permis l’expulsion
Au mois de novembre, un jugement a sommé l’association et ses résident-e-s de quitter le foyer. La préfecture avait du mal à se lancer dans cette expulsion, puisque après tout le foyer faisait le travail du 115 dans le 93 et que vue la hauteur de la tour, elle était dangereuse. Autant dire que le propriétaire et la mairie doivent être satisfaits.
Le dispositif policier interdisait aux soutiens d’entrer dans le périmètre du foyer, et de nombreuses personnes sur la liste ont galéré à pouvoir accéder aux officiels de la préfecture.
Face aux intérêts immobiliers, à la volonté de transformer Saint Ouen en Levallois du 93, la vie de jeunes et de familles qui vivent là depuis parfois 10 ans compte peu.
Une fois tout le monde monté dans les cars, les déménageurs ont commencé à faire leur travail, arrosant de verre tombé du 13ème étage de la route les passants.
On est peut être dispersé-e-s mais on était ensemble et on reste ensemble, solidaires. Carayevo, c’est peut être fini, mais la lutte continue !
(P-S: Le collectif a informé peu avant midi que 5 OQTF avaient été notifiées.)
[Publié le 27 juillet 2016 sur Paris-Luttes.Info.]