Pour protester contre la situation inacceptable des personnes vivant actuellement au Collège Maurice Scève, nous, Collectif de soutien aux habitants de l’ancien Collège Maurice Scève, appelons à un rassemblement le lundi 18 mars à 17h30 devant la Métropole (20 rue du Lac), à l’occasion du prochain conseil métropolitain, avec le Collectif « Mineurs isolés étrangers » créé par des travailleurs et travailleuses sociales et des militant.e.s de RESF, et avec les Collectifs de l’Amphi Z, de la Trappe et de la Maison Mandela. On revient ici sur l’histoire du lieu et la situation actuelle.
Des dizaines de jeunes migrants à la rue : Métropole et Préfecture hors la loi
Dès cet été, en pleine canicule, des dizaines de mineurs isolés et de jeunes majeurs étrangers, ont été laissés à la rue par les institutions. Pourtant, les mineurs isolés devraient être mis à l’abri et accompagnés par la Métropole de Lyon au titre de la protection de l’Enfance (logement, éducation, nourriture et santé), d’autant plus qu’elle possède sur son vaste territoire des dizaines de locaux vacants pouvant les accueillir. Les jeunes majeurs, dans le cadre de la demande d’asile déposée auprès de la préfecture, devraient avoir accès à un hébergement.
Seule la mairie du 1er arrondissement avait fait un geste pour les accueillir en ouvrant du 20 juillet au 31 août une salle municipale de sa compétence : la « Marmite », rue Diderot, pour en faire un « lieu de répit ». Mais à la reprise des activités associatives début septembre, les jeunes se sont à nouveau trouvés à la rue !
L’ex Collège Maurice Scève est occupé, squatté depuis fin septembre.
A l’appel de plusieurs associations de solidarité avec les migrants et de personnes en soutien à l’organisation de la « salle de répit », un rassemblement s’était tenu avec plusieurs centaines de personnes devant l’Hôtel de Métropole, le 17 septembre 2018, lors du premier conseil métropolitain de rentrée. Cela avait permis de rappeler ses responsabilités à David Kimelfeld, président de la Métropole, et aux élus. Un dialogue avait pu avoir lieu avec une partie d’entre eux.
Ne voyant toujours rien venir de concret, le groupe de jeunes migrants, des personnes solidaires soutenues par la CUM (Coordination Urgence Migrants) et des « Ouvreurs de Squat » ont décidé et mené à bien l’ouverture des locaux, vides depuis 5 ans, de l’ancien Collège Maurice Scève (Lyon 4è) appartenant à la Métropole de Lyon.
Depuis fin septembre 2018, ce sont plus de 200 jeunes migrants qui ont trouvé une protection « a minima » dans ce lieu.
Implication des jeunes et solidarité
Ces jeunes viennent pour la plupart d’Afrique de l’Ouest. Ils ont fuit la misère, les guerres ethniques, les différentes oppressions de gouvernements corrompus, une situation personnelle invivable. Pour arriver ici, dans le « pays des Droits de l’Homme », leur parcours a été long, périlleux, harassant. Ils ont vu, pour certains, des frères, des amis ou des parents mourir devant leurs yeux.
Aujourd’hui, ils ont trouvé un peu de répit dans ce lieu et le prennent en charge avec les personnes et associations en soutien pour en faire un lieu de vie convenable. Même s’il ne s’agit que d’un lieu de passage et d’information sur les démarches à faire en vue de leur régularisation et de leur prise en charge.
Ils ont ainsi désigné des « référents » qui s’organisent pour gérer la plupart des questions de la vie quotidienne et qui, avec les personnes en soutien, animent des commissions de travail (alimentation, travaux, animation, communication…). Ils s’organisent pour faire la cuisine sur place pour plus de 200 personnes tous les soirs, pour l’entretien des locaux, les travaux à faire pour améliorer un peu les conditions de vie, entre autres…
En plus de ces commissions, une Assemblée Générale hebdomadaire des soutiens se réunit sur place tous les mercredis soirs, en articulation avec une AG des habitants le dimanche soir.
Dès l’ouverture du lieu, un élan de solidarité s’est exprimé, dans le voisinage, le quartier et l’arrondissement à travers des visites, des dons de vêtements, de nourriture, de matériel ou l’accueil le temps d’un repas, d’une douche chaude…
Et la Métropole dans tout ça…
La première réaction de la Métropole de Lyon a été d’assigner les occupants en justice pour demander l’expulsion du lieu, mais le juge du tribunal administratif avait refusé l’expulsion d’urgence, reconnaissant implicitement le bien fondé de l’exigence de protection des mineurs isolés qui relève de la compétence de la Métropole.
Obligé de réagir, le Président de la Métropole avait deux options :
– « laisser pourrir » en rendant le lieu squatté invivable (pas de ramassage des ordures ménagères ; coupure de l’électricité et de l’alimentation en eau…) pour susciter la réaction hostile du voisinage et un harcèlement policier et administratif…en quelque sorte la « méthode » utilisée par Gérard Collomb et la Préfecture jusque-là…
– tolérer les nouveaux habitants du lieu et leurs soutiens, pour trouver un « modus vivendi » acceptable dans l’intérêt des jeunes.
Le dépôt rapide d’une déclaration de travaux pour couper l’électricité en amont du collège, l’ordre donné aux agents de la voirie du quartier de ne pas ramasser les ordures lors des premiers jours d’occupation ne présageait rien de bon.
Mais après avoir perdu l’action en justice, la Métropole a mandaté l’ALPIL (Association Lyonnaise Pour l’Insertion par le Logement) pour une mission de diagnostic et de médiation sur le lieu. Cette mission s’est prolongée par des interventions de l’ALPIL et du Foyer Notre Dame des Sans-Abris, qui se sont traduites concrètement à cette heure par :
– le maintien du ramassage des ordures ménagères
– l’installation de points d’eau provisoires à l’extérieur (avec de l’eau froide, pas très facile pour faire la vaisselle, surtout en hiver…)
– quelques petits travaux qualifiés d’« humanitaires » pour la « remise en état » d’un seul des trois bâtiments (alors que l’égalité de traitement est une forte demande de la part des occupants et des personnes en soutien) : installation de radiateurs électriques et mise en sécurité électrique (mais les coupures de courant sont encore quotidiennes)
– l’installation de trois blocs sanitaires dans la cour, avec 9 WC, 3 éviers et 9 douches (où il n’y a que de l’eau froide, l’alimentation électrique ne permettant visiblement pas de la chauffer…)
– l’approvisionnement en produits de base par la Banque alimentaire, avec l’intervention d’une salariée pour aider à la logistique et à la gestion des stocks
– la mise en place de deux permanences juridiques (une pour les mineurs et une pour les majeurs)
– l’intervention d’une éducatrice spécialisée
Une convention doit être signée entre l’ALPIL, le Foyer Notre Dame des Sans-Abris et la Métropole concernant l’intervention, notamment sur 4 axes :
accompagnement et médiation aux travaux (un animateur technique),
alimentation (appui à l’approvisionnement et gestion des stocks)
accès aux droits et soutien socio-juridique
accompagnement socio-éducatif des mineurs non-accompagnés.
Si la bonne volonté des associations impliquées et de leurs salarié.e.s n’est pas en cause, prétendre assurer un accompagnement correct à 200 jeunes vulnérables avec seulement ces maigres moyens est totalement irréaliste (seule une éducatrice spécialisée pour plus de 100 mineurs isolés étrangers ! ).
Mais même cet appui minimal semble problématique pour la Métropole puisque la signature de cette convention, annoncée fin janvier, est toujours retardée, au détriment des associations qui financent actuellement leur appui sur leurs fonds propres. De plus, la durée envisagée pour ce dispositif serait de 3 mois… Passé ce délai, la Métropole souhaiterait visiblement que le lieu n’accueille plus personne, même si des habitants libèrent des places parce qu’ils sont enfin pris en charge et hébergés dignement. En d’autres termes, l’institution souhaite que le lieu se vide petit à petit, pour faciliter l’expulsion quand le bâtiment sera vendu, et ce avec notre « collaboration » : une sorte d’expulsion autogérée ?! C’est hors de question !
La pénurie de places d’hébergement dignes de ce nom sur la métropole, les objectifs annoncés pour y remédier, toujours au stade de projet, ne permettent pas d’envisager quoi que ce soit de ce genre à court ou moyen terme.
Des jeunes qui arrivent tous les jours, et il n’y a plus de place…
La loi oblige les services de l’Aide sociale à l’Enfance (qui relève donc de la Métropole) à mettre à l’abri tou.te.s les mineur.e.s isolé.e.s présent.e.s sur le territoire quelle que soit leur nationalité. La réalité est toute autre. Les services en charge de l’évaluation retardent par tous les moyens une éventuelle reconnaissance de minorité même quand il s’agit de minots de 13/14ans. Et en définitive ils ne reconnaissent comme mineur.e.s qu’une petite partie d’entre eux (avec des méthodes et des arguments largement discutables). Aussi, des mineurs arrivent encore tous les jours au collège, à la recherche d’un refuge.
Les anciennes salles de classe et les autres pièces du site, toutes transformées en chambres, sont aujourd’hui surpeuplées. Mais, face à l’incompétence honteuse de nos institutions, aucune solution alternative ne peut être proposée aux jeunes.
Pourtant la Métropole sait trouver des moyens pour des opérations déconcertantes (et ridicules si la situation n’était pas si tragique) : quelle cruelle ironie pour ces jeunes sans-abris de lire partout sur les murs de la ville que « la Métropole travaille pour eux jour et nuit », quelle cruelle ironie de dépenser 1,8 millions d’euros l’an dernier pour « sécuriser » des bâtiments vides afin d’empêcher leur occupation.
Au delà des questions de budget, la Métropole justifie son incapacité à créer rapidement les places d’hébergement indispensables par la nécessité de respecter les procédures administratives.
Entre le respect du droit administratif et le respect de la déclaration des droits de l’enfant, la Métropole a fait son choix : elle préfère suivre scrupuleusement les longues procédures d’appel d’offre, quitte à ignorer son devoir de protection de l’enfance et à laisser des mineurs à la rue et sans assistance.
Les exigences des jeunes migrants et de leurs soutiens
L’ex-Collège squatté, construit sur les lieux où naquit l’Abbé Pierre, reste un lieu de vie et d’accueil d’urgence très précaire pour les migrants MNA (mineurs non accompagnés) et jeunes majeurs.
Au-delà de la situation de ce lieu particulier, nous dénonçons l’indécence des conditions de vie des mineur.e.s isolé.e.s et des migrantes et migrants sur le territoire de la métropole, et les conditions de travail largement dégradées des travailleuses et travailleurs sociaux chargé.e.s de les accueillir.
Devant l’inaction des institutions, nous avons squatté ce bâtiment et essayons d’organiser la vie à l’intérieur du mieux possible avec des moyens extrêmement précaires, parce qu’il nous apparaît prioritaire de mettre ces personnes à l’abri.
Aujourd’hui, la Métropole s’est engagée à un petit appui financier et logistique, via l’intervention de deux associations. Mais nous refusons que les moyens qui viennent d’être investis servent de caution à la Métropole et à la Préfecture pour éviter de répondre à leurs obligations légales en ce qui concerne l’accueil des migrants sur leur territoire.
Nous refusons que ce lieu constitue une solution d’accueil à bas coût. Et nous devons rester vigilants pour qu’il ne remplace en aucun cas d’autres places d’accueil et d’hébergement qui devraient être ouvertes et entretenues par la métropole et la préfecture. La solidarité qui s’exprime face à l’urgence et à l’indignité de l’ « accueil » institutionnel ne saurait servir de prétexte, de solution de rechange, permettant le retrait des institutions légalement en charge. C’est toute l’ambiguïté de la nouvelle ligne que nous impose de fait la métropole, sur la participation de la société civile à des solutions « low cost » participative que nous, collectif de soutien et jeunes habitants du lieu devrions trouver nous mêmes.
Devant l’indignation que suscite cette situation honteuse, mobilisons-nous !
Le 18 mars aura lieu un nouveau Conseil de Métropole : nous appelons à cette occasion à un rassemblement de protestation avec le collectif « Mineurs isolés étrangers » créé par des travailleurs et travailleuses sociales et des militant.e.s de RESF, et les collectifs de l’Amphi Z, de la Trappe et de Mandela (squats de Villeurbanne où vivent environ 300 personnes menacées d’expulsion).
Soyons nombreux à 17h30 ce jour là, devant la Métropole, au 20 rue du Lac (69 003), pour exiger qu’elle remplisse sa mission de protection de l’enfance et qu’elle prenne enfin les mesures d’urgence nécessaires pour créer les places d’hébergement qui manquent sur son territoire.
Le Collectif de soutien aux habitants de l’ancien Collège Maurice Scève
Si vous voulez nous aider :
Humainement : en rejoignant une des équipes organisées autour de l’accueil, des travaux, la gestion de l’alimentation, les animations éducatives et culturelles.
Matériellement : une aide financière permet de dépanner pour une nuit, ceux qui arrivent encore alors que le lieu est déjà bien complet.
Vous pouvez aussi rejoindre le réseau solidaire des personnes qui accueillent, dans les cas de grande urgence, un mineur pour quelques nuits.
Sachez que malgré le tragique de la situation, il y a ici de vrais éclats de rires qui réchauffent l’hiver !
Soutien financier :
A l’ordre de la CUM (Coordination Urgence Migrants) :
– Par chèques : CUM c/o Ligue des Droits de l’Homme -LDH-34 cours de Verdun 69002 – Lyon
– Par virements :IBAN : FR76 3000 3022 7600 0372 6578 836 mention « collège Maurice Scève »
Collège sans frontières Maurice Scève
8 Rue Louis Thévenet, Croix-Rousse, 69004 Lyon
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lecollege [at] riseup [point] net
mineur-isole-lyon [at] riseup [point] net
Permanence d’accueil au collège tous les jours de 17h à 20h.
Les sans-papiers: https://radar.squat.net/fr/groups/topic/sans-papiers
Des squats à Lyon https://radar.squat.net/fr/groups/city/lyon/squated/squat
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