Alerte en ce moment à Athènes :
Après une longue pause, le gouvernement grec a décidé de frapper à nouveau. Ce matin [mercredi 16 oct. 2019], deux squats sont en cours d’évacuation par la police, des agents de renseignement, la police antiterroriste, des MAT (CRS) et des employés de la voirie de la mairie d’Athènes.
Le pouvoir a choisi de frapper le squat Hôtel Oniro, un squat de réfugiés/migrants que nous connaissons bien, voisin du Notara 26, et un autre squat, celui-là fantôme (ouvert en avril et quasiment abandonné), au croisement des rues Éressiou et Thémistokléous, c’est-à-dire juste à côté du K*Vox, base de Rouvikonas et de la structure autogérée de santé d’Exarcheia (ADYE).
Il y a donc clairement une volonté du gouvernement de soigner son image, après avoir été ridiculisé ces derniers temps par la mobilisation dans le quartier(1), mais aussi hors des frontières(2).
Le fait d’avoir choisi deux squats très proches du Notara 26 et du K*Vox n’est probablement pas le fruit du hasard : le Notara 26 est très actif dans la résistance du quartier et c’est le plus ancien des squats de réfugiés/migrants à Athènes, dans un immeuble appartenant au ministère du travail, et le K*Vox est sans doute le lieu le plus stratégique et symbolique d’Exarcheia, avec un grand espace donnant sur la place qui sert de base au groupe Rouvikonas et dont le côté droit héberge le dispensaire médical autogéré du quartier. Notara 26 et le K*Vox sont également deux des principaux squats de l’assemblée du quartier nommée No Pasaran, à l’initiative de nombreuses manifs et actions. Bref, le pouvoir a voulu envoyer un signal fort à l’encontre de ces lieux, mais sans oser les attaquer pour l’instant.
On peut également remarquer que cette nouvelle offensive de l’État grec se produit deux jours après l’inculpation de plusieurs membres de Rouvikonas pour 4 actions à la fois, notamment les attaques de l’ambassade et du consulat de France en solidarité avec les victimes de la répression dans l’hexagone(3).
Comme on peut le voir sur les photos placées sous la carte du quartier, tout est fait pour essayer d’empêcher de photographier les enfants raflés. Des enfants et adultes qui vont être envoyés à la direction de la police des étrangers, puis dans des camps pour la plupart. Ces camps grecs(4) qui sont la honte de l’Europe : où tant de personnes sont entassées, humiliées, martyrisées et trouvent parfois la mort (incendies, intempéries, rixes, intoxications alimentaires, maladies…).
Autrement dit, le pouvoir rafle des gens qui vivaient paisiblement dans leur lieu, en autogestion, avec des assemblées, un peu comme une grande famille recomposée et solidaire, pour les séparer et les envoyer vers des lieux pour la plupart fermés, froids, austères, autoritaires et mortifères.
Une fois de plus, le pouvoir est un voleur de vies.
Une trentaine de réfugiés dont beaucoup d’enfants ont ainsi été raflés au squat Hôtel Oniro. Par contre, dans le squat fantôme de la rue Éressiou, il n’y avait qu’une seule personne : un étranger selon le communiqué de la police copié-collé à l’identique par les agences de presse, puis régurgité par les médias mainstream à la botte du pouvoir.
Rappel des évacuations précédentes (par trois fois) :
– le 26 août, dans « Exarcheia sous occupation policière »
– le 19 septembre, juste à côté d’Exarcheia, à l’ouest
– le 23 septembre, juste à côté d’Exarcheia, à l’est
Plus que jamais, nous appelons à soutien pour continuer à faire pression sur les autorités grecques partout dans le monde, notamment sur les ambassades et les consulats.
En Europe comme en Orient, le pouvoir est un fossoyeur d’utopie, mais nous sommes des graines, nous ne manquons pas d’idées pour riposter et nous sommes bien plus nombreux/ses qu’il le croit. Rien n’est fini, ni à Exarcheia ni ailleurs.
Yannis Youlountas (avec d’autres compagnons de lutte du quartier)
Notes:
(1) Par exemple, un réoccupation symbolique et festive du squat Spirou Trikoupi le 20 septembre ou encore l’annonce délirante du président du parlement grec, aux côtés du nouveau chef de la police, qui veut bâtir «une ligne Maginot contre Rouvikonas».
(2) Des actions et soutiens sur tous les continents (…).
(3) Convoqués avant-hier, Giorgos et Nikos de Rouvikonas viennent d’être inculpés pour l’attaque de l’ambassade et du consulat de France (en solidarité avec les victimes de la répression dans l’hexagone).
(4) Incendies puis inondations, récemment dans le camp de Moria à Lesbos.
[Publié le 16 octobre 2019 sur le blog de Yannis Youlountas.]