Brésil: Des manifs contre la Coupe du Monde… tous les jours !

Depuis jeudi dernier, jour du match d’ouverture de la Coupe du Monde, des manifestations plus ou moins importantes et offensives contre la Coupe du monde de la FIFA et du gouvernement brésilien ont lieu en marge de presque tous les matches du Mondial. La mobilisation continue!

Vendredi 13 juin, à Salvador de Bahia, alors que se jouait le match incroyable qui a opposé l’Espagne aux Pays-Bas dans le stade de l’Arena Fonte Nova, une manifestation s’est transformée en émeute suite à des affrontements avec la police. 11 manifestant-e-s ont été arrếtées « pour des actes de vandalisme » au centre-ville.

Vendredi 13 juin, juste avant le match Chili-Australie qui se jouait à Cuiabá, quelques dizaines de personnes ont manifesté calmement dans les rues de la capitale du Mato Grosso, à l’appel du Comitê Popular da Copa (Comité Populaire de la Coupe du Monde), derrière des banderoles contre « la Coupe du Monde des riches » et « FIFA go home« , sous la surveillance massive et armée de la police (à noter la présence menaçante de deux hélicos).

Rien qu’à Cuiabá, 780 procédures d’expulsion de logements sont actuellement en cours de décision de justice. L’organisation de cette Coupe du Monde n’est évidemment pas la seule responsable de cet état de fait, mais disons qu’elle y a ajouté sa pierre à l’édifice bourgeois de la propriété privée, à travers des processus de restructuration urbaine dans certains quartiers.

2014-06-13_Cuiaba_manifanticopa«On n’est pas dans une fête, en vrai on voit des milliards et des milliards de thunes détournées pour les intérêts de la FIFA», a dit un manifestant anarchiste qui s’est identifié comme Nestor, ajoutant pour expliquer les manifs: «Ce n’est pas contre l’équipe brésilienne, ni contre le football, c’est contre la corruption». Il déplorait aussi la violence policière qui réprime les manifestations contre la Coupe du Monde partout dans le pays.

Les manifestant-e-s protestaient également contre l’exploitation sexuelle des femmes et des adolescent-e-s pendant la Coupe du Monde et son lot de tourisme sexuel.

Un hommage a aussi été rendu à Mohamed Ali Maciel Afonso, ouvrier de 32 ans, mort électrocuté sur le chantier de l’Arena Pantanal, le stade de Cuiabá qui a été construit spécialement pour cette Coupe du Monde, dans une ville où la culture du foot est bien moins présente qu’ailleurs dans le pays (le premier club de la ville est en division 3 et attire bien peu de spectateurs). Ce stade aurait coûté environ 185 millions d’euros et accueillera seulement quatre matches pendant le Mondial. Et après ? On se souvient qu’une partie du chantier du stade avait été incendiée le 25 octobre dernier…

Le 25 octobre 2013, l'Arena Pantanal-Arena de Cuiaba est en feu !

Samedi 14 juin, au moins deux manifestations contre la Coupe du Monde ont eu lieu au Brésil.

2014-06-14_Belo_Horizonte_manifanticopa Une première manif s’est déroulée à Belo Horizonte, réunissant environ 250 personnes selon les médias mainstream locaux, à l’occasion du match Colombie-Grèce qui se jouait ce jour-même dans le stade Mineirão, dont le coût de rénovation se sera élevé à 226 millions d’euros.

La police militaire de l’État du Minas Gerais a déclaré avoir arrêté une dizaine de personnes masquées et munies de couteaux et de cocktails Molotov…

À Fortaleza, capitale de l’État du Ceará, la manifestation s’est passée calmement, à l’occasion du premier match se jouant dans le stade de l’Arena Castelão (Uruguay-Costa Rica). Les manifestant-e-s, qui étaient environ une centaine, ont bloqué les rues à plusieurs endroits, notamment près du stade où le match allait se jouer, en criant des slogans tels que « Mort au capitalisme« .

De nombreux flics et militaires étaient sur place pour surveiller et éventuellement réprimer la manif.

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Dimanche 15 juin, une manif a rassemblé 200 à 300 personnes près du stade Mané-Garrincha de Brasilia (rénové et ré-inauguré en mai 2013 après plus de 650 millions d’euros de travaux), sous haute surveillance policière, en marge du match Suisse-Equateur.

Selon un article du site d’info mainstream suisse 24 Heures, les manifestant-e-s criaient notamment «Je renonce à la Coupe, je veux plus d’argent pour la santé et l’éducation», accompagnés de sifflets et de tambours. «Nous ne sommes pas contre le football mais nous nous opposons aux 11 milliards de dollars d’argent publics dépensés» dans les stades et dans l’organisation de la Coupe, a déclaré Rodrigo Gadelha, 35 ans, membre du Syndicat national de l’Education.

À Rio de Janeiro, en début de soirée, Argentine-Bosnie se jouait au mythique stade Maracanã (rénové lors d’un chantier qui a coûté 342 millions d’euros). Il s’agissait du premier match de la Coupe du Monde 2014 à se jouer dans la ville de Rio. Pendant ce temps là, une manifestation de plus de 300 personnes avait lieu en dehors du stade. Avec un dispositif policier impressionnant, les manifestant-e-s ont été violemment réprimé-e-s à l’approche du stade Maracanã (grenades assourdissantes et des gaz lacrymogènes, notamment). Malgré la répression, la manifestation a continué dans les rues des quartiers de Tijuca et de Vila Isabel, où plusieurs banques ont été attaquées. La folie répressive ne s’est pas arrêtée là, puisqu’au moins un flic à moto (ou un mec d’une milice privée, comme il en existe plusieurs à Rio, notamment pour « pacifier » les favelas, et ces milices sont généralement constituées d’anciens flics ou militaires) a tiré à balle réelle sur les manifestant-e-s, ne faisant heureusement aucun-e blessé-e (cf. vidéo où l’on voit qu’en plus de commettre un acte inqualifiable, le « flic » ne semble aucunement en danger… pourquoi tire-t-il ?).

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À Porto Alegre, une petite manif a également eu lieu en marge du match Honduras-France qui s’est joué au stade Biera-Rio (rénové-réinauguré en avril 2014 après 107 millions d’euros de travaux).

Si les manifs réunissent actuellement moins de monde que lors du mouvement de juin 2013 (qui était simultané à l’espèce de répétition de la Coupe du Monde 2014 qu’était la Coupe des Confédérations 2013), il est remarquable de voir qu’elles continuent d’avoir lieu dans toutes les villes impliquées dans cette Coupe du Monde, avec une détermination qui confirme l’idée qu’une dynamique révolutionnaire s’est constituée au fil du mouvement né il y a un an.

Partout dans les médias, le gouvernement, les journalistes, les footeux les plus célèbres et un paquet d’autres personnalités médiatiques ont appelé au « calme », à la mettre en veilleuse le temps d’un mois de « réconciliation nationale » pour fêter l’événement… Sauf que pendant ce temps-là, rien ne change, l’État n’a voulu que pacifier la population (notamment celle des favelas). La meilleure réponse à lui opposer, c’est justement de ne pas rester calme. Ce que sont en train de faire un bon nombre de Brésilien-ne-s.

[Sources: L’Équipe | Associated Press | Autogestao | Diário do Nordeste | O Estado | 24 Heures | Terra na Copa | Sportyou | Correio Braziliense.]